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débat, se constituer auxiliaire du ministère public, aurait-il l’autorité nécessaire pour modérer la plaidoirie, pour la ramener au point du procès, pour user en un mot des pouvoirs étendus que la loi lui confère ? L’avocat peut tout se permettre si, même aux yeux du juge, sa plaidoirie a l’air d’une revanche de l’interrogatoire. L’excès de l’accusation a légitimé d’avance l’excès de la défense.

L’avocat dira donc, sans contrôle effectif, tout ce qu’il croira de nature à séduire le jury, et si, lorsqu’il parvient à la fin de sa péroraison, ses derniers mots sont couverts par un « tonnerre d’applaudissemens », si les jurés, oubliant le procès pour le spectacle, et entraînés par le public, participent eux-mêmes à l’enthousiasme ou au tumulte, gardons-nous d’accuser ces jurés, ou le public, ou l’avocat lui-même. Rapportons ces effets au milieu qui les détermine — c’est le milieu qu’il faut transformer. Mais par quels moyens pratiques ? N’avons-nous pas ici, après cet examen critique des principaux organes de la Cour d’assises, le devoir de conclure ?

Nous approchons en effet de cette dernière partie de notre tâche. Mais il convient, avant de l’aborder, d’examiner notre juridiction dans l’accomplissement d’une fonction très importante, et très différente de celle que nous venons de lui voir remplir. Pour avoir une idée complète de la Cour d’assises de la Seine, il faut la voir statuer sur un délit de presse.


JEAN CRUPPI.