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abaissera dans de grandes proportions le prix des transports ; enfin le gouvernement a pris en main d’une manière sérieuse la question de l’eau. On peut donc espérer que l’industrie de l’or va pouvoir se développer plus librement et renouveler l’Australie de l’ouest comme elle l’a déjà fait pour les colonies de l’est et la Nouvelle-Zélande.

Si ce n’est pas, en effet, la découverte de l’or qui a fait l’Australie, puisqu’il existait déjà dans ce pays un très grand développement agricole et une population de près d’un demi-million d’habitans au moment où elle a eu lieu, il n’en est pas moins vrai qu’elle a énormément hâté ce développement et qu’elle a changé aussi la constitution sociale des colonies australiennes. L’immigration colossale qui s’est précipitée sur l’Australie après 1851 a fait le pays le plus démocratique du monde de ces colonies qui avaient semblé d’abord, aux yeux d’observateurs perspicaces, destinées à former une société aristocratique, soumise à l’influence des grands propriétaires. L’exubérante, mais fragile prospérité qui s’en est suivie n’a pas été non plus sans inconvéniens. Lorsque, dans ces dernières années, le mouvement ascendant s’est ralenti puis arrêté, cette société, un peu déséquilibrée, a été tout étonnée et a cherché un remède à l’inconstance de la fortune dans les innovations sociales aventureuses, qu’elle a entreprises avec une hardiesse et sur une échelle inconnues ailleurs. Il ne sera pas sans intérêt d’étudier avec quelque détail ce fertile champ d’expériences que le vieux monde a l’heureuse chance d’avoir sous les yeux, et dont l’exemple peut lui offrir des enseignemens précieux et lui éviter de pénibles écoles.


PIERRE LEROY-BEAULIEU.