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Nous avons été conduits par suite à essayer pendant ces dernières années de mettre en comparaison les betteraves dites à collet rose avec les Globe à petites feuilles : en cultivant les deux variétés aux faibles écartemens nous en avons tiré les mêmes quantités de matière sèche, de sucre, de matières azotées ; toutefois, en 1894, les collet-rose renfermaient beaucoup moins de salpêtre, et c’était là un sérieux avantage qui, malheureusement, n’a pas persisté en 1895.

Faudrait-il aller plus loin encore et livrer aux animaux les betteraves sélectionnées depuis longtemps pour la production du sucre ? Nous y avons songé, mais les rendemens à l’hectare ont toujours été trop faibles pour que, malgré leur richesse en matière sèche et en sucre, ces racines fournissent autant de matières alimentaires que les variétés plus étoffées.

Ce n’est pas seulement, au reste, contre les variétés de distillerie que les betteraves fourragères ont à lutter, mais aussi contre les pommes de terre. Nous avons exposé ici même[1] les progrès remarquables qu’a faits sous l’impulsion de M. Aimé Girard la culture de la pomme de terre, nous savons qu’en suivant les indications précises qu’il a données, les rendemens de tubercules à l’hectare dépassent habituellement 30 000 kilos et atteignent parfois 40 tonnes. Nous savons en outre que, distribuée cuite aux bœufs à l’engraissement, la pomme de terre a donné des résultats très avantageux, et on est en droit de se demander s’il ne conviendrait pas de substituer la culture des pommes de terre à haut rendement à celle des betteraves fourragères.

Il n’est pas démontré, jusqu’à présent, qu’à poids de matière sèche égal, la pomme de terre ait des propriétés nutritives supérieures à celles de la betterave ; si nous supposons qu’à poids égaux de matière sèche les deux alimens s’équivalent, on se décidera pour l’une ou l’autre culture suivant le poids de matière sèche obtenu à l’hectare et suivant le prix de revient de cette matière sèche.

Si je prends comme exemple ce que j’obtiens au champ d’expériences de Grignon, je trouve que les variétés de pommes de terre les plus prolifiques me donnent de 30 à 35 tonnes de tubercules, je n’atteins pas 40 tonnes ; les tubercules renferment habituellement le quart de leur poids de matière sèche, je reste donc entre 7 et 9 tonnes de matière sèche ; or, avec les betteraves Globe, je puis récolter de 60 à 80 tonnes de racines renfermant de 10 à 11 tonnes et demie de matière sèche. Dans une

  1. Voyez la Revue du 1er septembre 1895.