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elles se trouvent celles des candidats, comme Berryer, Montalembert et Musset, que Notre-Dame l’Académie vient d’élire, ainsi que je le désirais fort. Avant de partir de Paris j’avais fait manquer une élection parce que je n’avais pas voulu donner ma voix à d’autres qu’à Musset. Nous étions quatre immuables dans cette idée qui depuis a fait des prosélytes, comme vous voyez.

Non, mon amie, je n’ai point quitté mon ermitage et ma cellule. Si je soulève mon capuchon en ce moment, c’est seulement pour vous dire sur-le-champ que malheureusement ceux qui ont dit que j’ai passé à Paris en ont menti par la gorge, comme disaient nos pères. Avant mon départ, à notre passage, à mon retour, vous l’auriez su la première. Peu s’en faut que je ne cède à la tentation de vous envoyer les lettres de regrets et même de reproches dont on me poursuit de Paris tous les jours, et ce matin encore. Je vous assure qu’on ne s’y contenterait pas de mes cartes de visites, et pourtant on n’y reçoit pas même cela.

J’allais vous écrire mon étonnement de ce que vous m’avez appris sur cette intéressante et courageuse Mlle Sedaine. Est-ce possible ? En êtes-vous bien sûre ? Quelques jours après la publication de cet écrit sur la propriété littéraire où j’avais parlé d’elle et raconté les travaux de son père, dont elle avait perdu le fruit, le ministre de l’intérieur et le ministre de l’instruction publique de ce quart d’heure politique vinrent ensemble me chercher, dans leur empressement de restituer à Mlle Sedaine la pension que l’empereur lui avait faite en dédommagement de ce que lui arrachait la loi qui dépouille, après dix ans, les héritiers d’un grand écrivain de ses droits d’auteur. Ces deux ministres avaient si vivement senti le reproche que je leur faisais publiquement, et leurs yeux s’étaient si miraculeusement ouverts, qu’ils se disputèrent le droit de rendre à Mlle Sedaine sa pauvre petite pension impériale et royale. Mlle Sedaine m’écrivit qu’elle lui était rendue, en me remerciant ; et un de ses amis, dont je crois encore avoir les lettres à Paris, me confirma cette bonne nouvelle. Sur cette assurance je louai cette restitution dans un post-scriptum ajouté à ma lettre aux députés, que vous pouvez lire encore, à la suite de Stello, et que l’on vient de réimprimer il y a peu de jours avec une nouvelle édition de tous mes ouvrages. L’avait-on trompée, lui a-t-on encore manqué de parole ? Je rayerai mes éloges et reprendrai mes deux lignes d’approbation. Faites-moi savoir la vérité, et soyez sûre que je ferai ce qu’il faudra pour que