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de son effectif. Sa superficie, comparée au nombre de ses citoyens, correspondait, pour le Parisien du premier Empire, à 55 mètres carrés par tête ; pour le Parisien de la troisième République elle n’équivaut plus qu’à 33 mètres carrés. Force a donc été de se serrer encore et, dans le milieu surtout, de grimper sur les épaules des occupans primitifs, en multipliant les couches de locataires amoncelés.

Vu du haut des airs, le département de la Seine offre le relief d’une gigantesque pyramide de toits, formant des gradins décroissans vers les campagnes de Seine-et-Oise. Aux premiers plans, dans la banlieue, 650 maisons sur 1 000 n’ont qu’un rez-de-chaussée ou un étage ; 45 seulement ont quatre étages. A l’intérieur des fortifications, dans les dix arrondissemens excentriques, sur un millier de constructions, il n’y en a plus que 350 d’un étage ; il en est déjà 320 de quatre étages au moins. Dans le noyau principal, formé par le Paris de la Révolution, on rencontre seulement 60 maisons d’un étage sur 1 000 ; il s’en trouve au contraire 800 de quatre à sept étages. Enfin, au sommet de cette falaise de maçonnerie, sont placés les quartiers des Halles, du Palais-Royal, de la place Vendôme, dont 950 maisons sur 1 000 ont quatre étages et plus, dont 500 ont au moins six étages.

Paris est, de toutes les capitales d’Europe, la plus surélevée ; à Berlin ou à Vienne les maisons de cinq étages constituent une rareté. Mais au regard de celles des Etats-Unis, qui se poussent ambitieusement jusqu’à 18 étages, et monteraient jusqu’à 21, n’était qu’une loi récente du Congrès y eût mis obstacle, les 13 ou 1400 immeubles de notre chef-lieu français, dotés en hauteur de 7 compartimens superposés, paraissent vraiment bien près de terre. Parti de la tente pastorale, dont l’architecture chinoise a conservé le type, de la grotte égyptienne, creusée dans la roche, ou de la cabane grecque, grossièrement charpentée de bois, l’homme s’est bâti, suivant les climats, le sous-sol, les milieux politiques ou économiques, diverses sortes d’abri. Après mille péripéties et des efforts trente fois séculaires, le nid où le bipède urbain, la plus raffinée sans nul doute des créatures de Dieu, se retire à présent pour aimer, manger et dormir, a pris le genre d’une ruche de pierre, dans laquelle chaque famille occupe privément un certain nombre d’alvéoles, sous la condition de payer son terme au propriétaire.

La « maison de location », grande, belle, confortable et même