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remis à la femme, qui retourne chez ses parens : le trousseau reçu de son père et qui, suivant la fortune et la générosité de celui-ci, comprend des vêtemens, meubles, parures, auquel parfois l’argent et même des immeubles, est naturellement rendu, mais dans l’état où il se trouve au moment du divorce : le mari, qui, pendant la durée du mariage, en a eu la libre disposition, ne doit aucun compte des sommes dépensées ni des biens vendus; je note immédiatement que, lors de la mort de la femme mariée, le trousseau passe à ses enfans ou revient à sa maison paternelle, suivant les conventions.

Malgré l’étroite sujétion où se trouve la femme, si elle rencontre une belle-mère d’humeur douce, un mari qui la traite passablement, sa vie, pour différente qu’elle soit de celle d’une Européenne, peut offrir quelque agrément : la claustration du gynécée n’est pas telle qu’il n’y ait les visites des parentes et amies, parfois même d’un parent ou d’un étranger dûment présenté et qu’on va recevoir en compagnie du mari, dans le salon extérieur; il y a les cérémonies du culte domestique et le pèlerinage aux tombeaux, qui reviennent à époques fixes; de temps en temps un mariage, un enterrement chez des parens : toutes ces circonstances sont accompagnées de festins rituels; si l’on demeure à la ville, on passe la canicule dans une villa de famille ou dans un temple qu’on loue à la campagne; parfois, bien rarement, on va faire des emplettes dans une boutique ou l’on se rend à quelque temple pour une foire : dans ces sorties comme à l’intérieur du gynécée, la femme a le visage découvert. Lors des fêtes, les gens riches font venir la comédie chez eux et les femmes y assistent d’un appartement séparé. La vie tout unie de chaque jour avec de nombreuses servantes et beaucoup de bavardages; les soins de la toilette, la coiffure avec des fleurs, le fard, les bijoux, les vêtemens faits des plus riches soieries, mais peu sujets aux variations de la mode et de même coupe pour tous les âges : tout cela n’est pas fait pour déplaire à la majorité des femmes; et pour celles qui sont instruites, il se trouve toujours facilement des occupations. Cette existence du gynécée est large, souvent somptueuse, susceptible d’être intelligente; ce qui y manque, à notre point de vue, c’est la liberté des mouvemens; mais, dans cette race, la personnalité est peu marquée et l’éducation ne fait rien pour la développer chez la femme : je dirai plus, toute la vie chinoise est orientée vers la famille, et non vers la personne ; une