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catholiques d’avoir à se servir de cet engagement, — pris peut-être un peu à la légère et que les pouvoirs nouveaux auraient volontiers mis en oubli, — pour les sommer de le remplir. Ils se présentaient ainsi, non comme des novateurs qui veulent apporter une réforme dans l’Etat, mais comme des créanciers, leur contrat à la main, qui citent leur débiteur devant un tribunal. Sur ce terrain restreint, strictement légal, beaucoup d’esprits pieux et modérés, qu’avaient effrayés les généralités bruyantes de Lamennais, n’hésitèrent pas à se placer et furent suivis bientôt par de hautes autorités ecclésiastiques, puis enfin par l’épiscopat presque tout entier.

Le Père Maumus a raison de constater l’heureux effet produit par cette concentration (comme nous dirions aujourd’hui) de toutes les forces catholiques sur un point nettement déterminé de droit positif. Mais, dans l’analogie qu’il en tire pour indiquer aux catholiques d’aujourd’hui la conduite qu’ils doivent tenir dans le temps présent, sa manière d’apercevoir et de présenter les faits pèche par défaut d’exactitude. On pourrait croire, à l’entendre, que, par le seul fait que les défenseurs de la liberté d’enseignement appuyaient leur réclamation sur le texte d’un des articles de la charte de 1830, ils faisaient par là une adhésion implicite à tous les autres, en particulier à ceux qui avaient établi une monarchie nouvelle, fondée, non sur une transmission héréditaire, mais sur un acte de la souveraineté nationale. C’eût été ainsi, de leur part, un assentiment donné à la royauté de 1830, pareil à celui qu’on demande aux catholiques aujourd’hui pour la république. Ceux qui ont vécu dans ces temps déjà éloignés, et j’étais du nombre (témoin très jeune, mais attentif et en mesure d’être bien informé), savent parfaitement que rien de pareil n’eut lieu. Parmi les combattans les plus zélés et les plus dévoués qui prenaient part à cette croisade, un très grand nombre (peut-être même le plus grand) professaient une foi monarchique qui n’allait nullement à l’adresse de la famille régnante. Leurs vœux et leurs espérances étaient tournées hors de France, vers l’héritier de la branche aînée de la maison royale. Personne ne leur demanda le sacrifice d’une fidélité à laquelle ils croyaient leur honneur comme leur conscience engagés. Il ne fut question ni de renier leurs convictions, ni même d’en ajourner ou d’en atténuer l’expression. Le mot de ralliement, qui existait déjà, ne fut pas prononcé. Si le conseil en eût été donné, je doute qu’il eût été suivi; mais on