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Les Maigesetze n’avaient eu en réalité pour objet que de briser cet organisme dans ses parties les plus essentielles. Il était donc à prévoir qu’avant la révision de ces lois, et malgré toutes les ressources dont disposait le prince de Bismarck, le rétablissement d’une situation confessionnelle normale ne serait pas possible en Prusse. C’est ce que M. Windthorst avait déclaré à la Chambre des députés, à Berlin, le 11 juin. Ce fut dans le même sens que s’exprima, quelques jours plus tard, le cardinal Jacobini, vis-à-vis de M. de Schlœzer, qui était venu lui demander si le Saint-Siège était satisfait des efforts tentés à Berlin en vue d’assurer la pacification religieuse. Le 21 juin, le secrétaire d’Etat fit savoir au ministre de Prusse que le Pape ne donnerait pas son assentiment à la nouvelle loi, quelque favorables que parussent les dispositions dont le gouvernement royal avait fait preuve en acceptant certaines modifications apportées au premier projet de loi présenté par le ministre des cultes, M. de Gossler. Le cardinal Jacobini n’admettait pas que le pouvoir civil pût acquérir en matière religieuse, par la voie législative, des privilèges purement spirituels dont le Saint-Père avait nécessairement subordonné la concession à certaines garanties pour l’Église.

M. de Schlœzer reçut cette communication sans sourciller. Il avait craint un instant que la Curie n’enjoignît aux députés du Centre de ne pas voter la loi ; ce danger étant écarté, il demeurait dès lors très vraisemblable que les choses s’arrangeraient peu à peu d’elles-mêmes. « Des deux choses que le Vatican nous avait demandées, continuait le ministre de Prusse, l’indépendance du ministère pastoral et la liberté de l’éducation du clergé, la première va exister de fait pour peu que les catholiques veuillent profiter de la loi, puisque le nombre des cas pour lesquels l’Anzeigepflicht restera exigible est sensiblement restreint. Quant à la seconde, la formation indépendante des jeunes clercs, nous ne pouvons pas l’accorder, et le Vatican ne la réclamerait pas avec tant d’insistance, s’il voulait bien se rendre compte que nous sommes un pays protestant. En France, nul n’a jamais pu reprocher au clergé de n’être pas très national : aussi cette question de l’éducation des prêtres est très simple. En Allemagne, la situation est différente : le clergé catholique n’aime pas l’empire et il est imbu de toutes les idées en faveur à Rome dans le Collège germanique. Sur ce point donc nous ne saurions céder. Nous finirons cependant par nous entendre, et ce serait déjà fait, si le