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quelque distance des juges du droit ; l’institution, telle qu’elle est, semble peut-être peu logique : on la dédaigne, mais elle est populaire ; on en médit, mais on veut la garder. Aussi, malgré notre désir de voir s’établir une collaboration meilleure entre les deux magistratures, nous ne proposons pas d’aller de primesaut à leur réunion, c’est-à-dire à l’échevinage en matière criminelle.

Recherchons seulement les réformes pratiques, qui, sans porter directement atteinte à nos traditions, rendraient plus nets et plus utiles les rapports entre jurés et magistrats.

Nous demandons d’abord que le ministère public et l’avocat, loin d’être obligés par le Gode à ne pas s’expliquer sur la peine, se voient imposer le devoir de faire connaître exactement au jury les diverses conséquences légales des questions qui lui seront posées.

Afin que le jury comprenne bien ces explications, nous demandons que les questions, au lieu d’être posées après la clôture des débats, soient posées par le président des assises et remises par écrit aux jurés, immédiatement après l’administration de la preuve, avant le réquisitoire et la plaidoirie.

Ce procédé d’ailleurs est de règle en Autriche et en Allemagne[1].

Ces premières mesures auront déjà pour résultat de préciser en temps utile aux yeux des jurés l’objet et l’étendue de leur tâche, de prévenir des erreurs et des malentendus qui se produisent en France tous les jours.

Ce n’est pas tout. Il faut qu’après les plaidoiries achevées, le président des assises prenne à son tour la parole.

Voudriez-vous revenir au résumé ? va-t-on s’écrier. Pas le moins du monde. Nous demandons que le président ait le devoir de donner aux jurés des instructions de droit, en leur faisant connaître, les textes à la main, le mécanisme des questions qui leur ont été posées. Actuellement, ce magistrat, qui doit « s’abstenir de faire connaître aux jurés les conséquences légales de leur déclaration », peut cependant, « si le défenseur les a induits en erreur sur la gravité de la peine, rectifier ce qu’il y a d’erroné dans ces assertions ! »

  1. Voyez Code de procédure pénale allemand, par Fernand Daguin, p. 108 ; et l’art. 290 de ce Code, lequel est ainsi conçu : « Après la clôture de l’administration de la preuve (Beweisaufnahme), il sera donné lecture des questions. Le président pourra les communiquer en copie aux jurés, au ministère public et à l’accusé, et il sera tenu de le faire, toutes les fois qu’une demande sera déposée à cet effet. »