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des territoires entre les mains de plusieurs princes, cliens et associés de la France, la disparition des souverainetés ecclésiastiques, clientes de l’Autriche.

On lit dans les instructions que le Directoire fit dresser, au commencement de novembre 1797, pour les plénipotentiaires français :

« Quoique le traité qui vient d’être conclu avec l’empereur soit appelé définitif, il n’est encore qu’un préliminaire en cela qu’une partie des arrangemens qui y sont stipulés est dépendante de la paix de l’Empire. Un congrès sera tenu à Rastadt ; son objet direct est le rétablissement de la paix entre la République française et l’Empire… Son objet majeur… est de réorganiser l’Empire et le corps germanique en conséquence des réductions qu’ils auront éprouvées l’un et l’autre… » « L’intérêt de la République, celui de l’Allemagne considérée comme nation, celui de la vérité » exigent que l’on profite « d’une circonstance qui peut ne se retrouver jamais… pour couronner sans retour le salutaire ouvrage qui fut commencé à la paix de Munster, et qui, pendant un siècle et demi est demeuré imparfait. » C’est « une opération absolument nécessaire. » « Tous les efforts des plénipotentiaires devront se porter vers la sécularisation totale des puissances ecclésiastiques de l’une et de l’autre religion, depuis les électorats jusqu’aux chapitres. »

C’est l’opération que Bonaparte consomma en 1803. Les politiques de Paris y voyaient la consécration des traités de Westphalie et ne s’apercevaient pas qu’en abattant les clôtures, en groupant les peuples d’Allemagne, en défrichant et nivelant le labyrinthe des petits États, on affaiblirait, sans aucun doute, la puissance de l’Autriche, mais ce serait pour accroître d’autres États que l’avidité même qui les livrerait à la république, rendrait, tôt ou tard, hostiles ou redoutables à la France, après qu’elle les aurait satisfaits et agrandis. En premier lieu, la Prusse. Le Directoire a besoin, en Allemagne, d’un allié puissant qui puisse contenir l’Autriche, la prendre à revers, l’arrêter dans ses entreprises contre l’Italie. La Prusse aurait pu être cet allié, et le Directoire aurait alors « favorisé de tous ses moyens l’extension de cette puissance en Allemagne, soit en territoires, soit en influence. » Ses éternelles tergiversations ont compromis les succès de la République : elle ne mérite aucune récompense. Toutefois si elle entre dans les vues de la République, la République est disposée à la payer ; elle voit son intérêt à ménager la Prusse. Le Directoire tiendra la balance égale entre cette cour et l’Autriche, et par leur opposition, il gouvernera l’Allemagne, dont il deviendra l’arbitre. Il esquisse un plan de distribution des territoires : l’un de ses