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champs les prairies artificielles ; on augmenta le produit. Les moyennes passèrent de dix-sept à dix-huit hectolitres. Dans les bons endroits et sous l’action d’une intelligence appliquée, le rendement alla bientôt à vingt et vingt-cinq, rarement plus haut, à moins de circonstances exceptionnelles. La culture dite « intensive » naissait à peine par l’emploi de méthodes nouvelles que dictait la science, et des engrais chimiques dont elle démontrait mathématiquement la nécessité.

La concurrence des céréales étrangères fit presque subitement surgir d’autres perplexités : la production du blé était elle-même menacée. Elle allait sombrer si dans une plus large mesure la science ne venait à son secours. Mais cette science, il fallait l’enseigner. Elle n’était pas d’emblée à la portée de tous, et il était malaisé d’en répandre les notions dans les intelligences frustes des habitans de la campagne, où le travail manuel laisse peu de temps à l’enseignement théorique. C’est de ce besoin qu’est né l’enseignement agricole. Nous allons voir comment il est appliqué et ce qu’il a produit.


I

Notre dessein n’est pas de nous occuper ici du haut enseignement agricole. Il est distribué, et avec fruit, dans un établissement de l’État qui porte le nom assez significatif d’ « Institut agronomique ». C’est une sorte d’École normale de l’agriculture, ou si l’on veut d’École polytechnique agricole ; c’est une pépinière où l’État va recruter ses futurs ingénieurs des forêts et ses futurs officiers des haras. C’est là aussi qu’il se prépare les fonctionnaires qu’il attache à son département de l’agriculture ; c’est là enfin que vont achever leurs études les jeunes gens, fils de famille, portés par vocation ou par nécessité à embrasser la carrière agricole, ceux enfin qui, sans fortune, veulent devenir professeurs libres ou salariés par le ministère. Aussi l’Institut agronomique a-t-il des « bourses » comme les autres écoles et lycées entretenus par l’État.

Les premières écoles d’agriculture furent, on le sait, fondées par des particuliers, par Mathieu de Dombasle à Roville, par Auguste Bella à Grignon, par Rieffel à Grand-Jouan, par Nivière à la Saulsaie. Déjà sous le Directoire, François de Neufchâteau avait conçu l’idée d’un enseignement agricole à trois degrés correspondant à ceux de l’enseignement classique. Dans les tourmentes qui suivirent, ce beau plan fut oublié ; mais les gouvernemens après 1815, sans reprendre l’idée ambitieuse de François de Neufchâteau, firent pourtant un effort en re-