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à-dire chacun 210 000 francs ; et après avoir rappelé que ces écoles ne sont nullement gratuites, que la pension est de 1 200 francs à Grignon et de 1 000 francs aux deux autres écoles, il ajoute audacieusement : « Avec des pensions à ce tarif et une subvention de 210 000 francs, une congrégation religieuse se chargerait de faire une école d’agriculture comme il n’en existe pas sous le soleil. » Nous nous permettrons d’ajouter que sans doute elle entretiendrait un peu plus des cent pensionnaires que chacune des écoles de l’État abrite.

Que l’on fasse appel aux congrégations ou qu’on répudie leurs services, il n’en est pas moins vrai que l’État est incapable d’organiser un enseignement agricole sérieux d’ordre secondaire et qui ne lui coûte rien. Ce ne sont pas les cours facultatifs qu’il pourra introduire dans ses lycées qui feront des agriculteurs et retiendront les populations dans les champs. Comme pour l’enseignement supérieur, c’est de l’initiative privée qu’il faut solliciter ce bienfait. Il s’opère en ce moment dans les esprits une évolution qui pourrait dissiper quelques préjugés et faire éclore quelques idées fécondes. L’une d’elles est entrée dans le domaine de la pratique. Au collège de Vaugirard, connu sous le titre de « l’Immaculée-Conception », il a été ajouté des cours spéciaux et préparatoires pour l’Institut national agronomique. De même qu’on y prépare les élèves pour l’École militaire de Saint-Cyr et pour l’École polytechnique, on distribue un enseignement spécial qui leur permet de concourir par l’admission à cette école de Polytechnie agricole d’où ils sortiront avec un diplôme officiel. Voilà encore un exemple. Depuis trois ans il est donné au collège libre de Boulogne-sur-Mer. C’était un essai. Il n’a peut-être pas encore produit l’effet qu’on en attend ; mais ici, à Paris, sur le grand champ de bataille des hautes études, près de la porte qui en ouvre l’accès, il est raisonnable de penser que dans deux ans quelques élèves reçus brillamment feront naître dans les familles la pensée que l’homme qui cultive la terre rend à sa patrie un service égal à celui du soldat qui la défend. Les deux services se confondent et sont dignes du même honneur.


V

Si l’État est impropre à répandre comme il le faudrait l’enseignement agricole secondaire, l’est-il également pour distribuer avec une abondance que son objet commande cet enseignement primaire appliqué aux travaux agricoles ? Réduit à ses plus étroites proportions, l’État,