Page:Revue des Deux Mondes - 1897 - tome 143.djvu/183

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

avant d’être achevées, offrent le témoignage d’une ambitieuse impuissance, dont le contraste avec les monumens antiques est trop choquant. Le plan régulateur, sous le contrôle de l’Etat, pouvait facilement réserver les entourages. Et, si les champs d’artichauts mêlés de buissons de grenadiers et de lauriers-roses, qui jadis s’avançaient innocemment jusqu’aux arcades de l’amphithéâtre flavien, choquaient une municipalité qui se respecte, on pouvait au moins laisser les arbres en les entourant de quelque verdure.

Heureusement du moins elle fut abandonnée, cette proposition d’une Exposition universelle à Rome en 1895. On avait eu la funeste pensée de la placer dans l’espace compris entre la porte Capène et thermes de Caracalla. C’était presque la seule partie de Rome qui fût demeurée à peu près respectée. Encore le grand cirque qui en est comme l’entrée est-il devenu l’usine à gaz. On aurait infailliblement détruit cette courbe de l’auberge de la Moletta qui retrace encore l’inflexion du cirque à son extrémité. Qu’eût-on pu faire du cirque de Maxence ? On aurait vu un champ de foire, une rue du Caire, des fontaines lumineuses, une galerie des machines, servir de préambule à la voie Appienne, à l’entrée des catacombes, à tant de sanctuaires dispersés dans cette région de la ville. Cela sans parler des obstacles du climat de Rome, ou de l’opinion qu’on s’en fait au dehors. Il faut rendre du moins cette justice au bon sens italien, jamais l’opinion publique ne fut favorable à un tel projet. Après un moment de faveur qu’avait su mériter l’ardeur des premiers apôtres, les objections arrivèrent en grand nombre ; mais la plupart de ces objections étaient, tirées du péril financier, très grave assurément. On put s’étonner que fort peu de voix se fussent élevées pour représenter quelle profanation nouvelle, si l’entreprise était arrivée seulement à un commencement d’exécution, aurait achevé de ruiner ce qui fait l’originalité de Rome, la grandeur de son aspect et de ses souvenirs.


II

Avec beaucoup de raison, l’administration romaine prend à sa charge et sous sa direction exclusive les fouilles qu’il y a lieu d’entreprendre dans l’enceinte de la ville, mais j’ai vu des visiteurs — des plus intelligens et des plus respectueux de Rome — prendre