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vraies du Nord que quelques traits plus accusés précisant çà et là les physionomies d’un bourgeois de Stockholm ou de Christiania.

Peu à peu, le désir grandit de faire connaissance plus intime avec ces peuples qui nous avaient procuré une émotion nouvelle : derrière les polémistes, on alla chercher les conteurs populaires, les historiens de la vie quotidienne et nationale ; sur les traductions multipliées, les commentaires furent moins fantaisistes. Ce fut une seconde période plus calme et réfléchie, qui eut pour résultat de nous faire plus clairement concevoir l’originalité de cette littérature septentrionale, à peine entrevue d’abord à travers les œuvres universellement humaines des penseurs et des poètes.

Tandis que notre information littéraire se complète chaque jour, nous demeurons dans une indifférence égale au sujet de l’art Scandinave qui vint chez nous de manière beaucoup plus simple. Nous le connaissons de longue date, mais son introduction s’est faite sans bruit, sans réclame, par un progrès tranquille qui n’a point soulevé de protestation ; et cette continuité paisible de succès l’a maintenu en dehors du mouvement d’études qui s’attachait, en ces dernières années, à tout ce qui venait du Nord. Dès 1855, les expositions des artistes Scandinaves étaient remarquées à Paris ; en 1889, alors qu’on savait à peine prononcer le nom d’Ibsen, la critique s’occupait de Larson et d’Edelfeldt : aujourd’hui, les peintres et les sculpteurs de Suède, de Norvège, de Finlande, forment le groupe étranger le plus intéressant du salon du Champ-de-Mars ; leurs œuvres sont recherchées, mais on les considère individuellement : on consacre en passant quelques lignes de compte rendu sympathique à leurs ouvrages, sans se demander s’ils ont une tradition, quelles influences d’écoles ils ont subies et s’il existe entre ces artistes, dont isolément on vante le talent, une originalité commune et qui tienne à leur race et à leur pays.

Or, en art plus encore qu’en littérature, il semble que la Scandinavie « arrive » à l’heure présente. Avant notre époque, il y eut en Suède et en Norvège une vie artistique que nous ignorons trop volontiers : les peintres et les sculpteurs de talent n’y sont point rares. Mais, après de rares prédécesseurs, c’est la génération actuelle qui a le plus fait en Scandinavie pour renouveler l’inspiration et les procédés : elle commence déjà à faire école : bientôt