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la partie des États-Unis qu’on dénomme Nouvelle-Angleterre et qui est située sur l’Atlantique, semble indiquer que, à un certain degré d’aisance et sous l’inspiration de sentimens démocratiques, la tendance à l’accroissement de la population devient excessivement faible. Il n’est nullement démontré que les autres contrées du monde ne doivent pas un jour se rapprocher de la situation de la France et avoir, elles aussi, une population stationnaire[1]. » Depuis lors, l’observation attentive des phénomènes démographiques contemporains dans les divers pays civilisés nous ont conduit, à diverses reprises, à préciser notre doctrine : et nous pouvons considérer comme démontrable et démontré que la civilisation démocratique est contraire à la prolificité, que graduellement tous les peuples civilisés, au fur et à mesure que la conception démocratique pénétrera leurs couches profondes, verront leur natalité décroître et se rapprocher de celle de la France. Déjà cette tendance à la réduction proportionnelle des naissances est très accentuée en Angleterre, en Suisse, en Belgique, dans les pays Scandinaves et aux Etats-Unis d’Amérique. Les observateurs les plus avisés et les plus exacts, M. Emile Levasseur en France, M. Marshall en Angleterre, M. Nitti en Italie, M. Robert P. Porter, le surintendant du Census de 1890, aux Etats-Unis, sans démêler tous exactement la grande influence dépressive de la natalité, à savoir le sentiment démocratique, constatent que le cas de la France n’est pas isolé ; que notre pays pourrait n’avoir que devancé les autres ; et que nombre de contrées s’acheminent dans la même voie. L’examen des chiffres relatifs aux mouvemens de la population dans les principaux pays en fournira la preuve évidente.


III

Le statisticien qui a le plus complètement et méthodiquement réuni les documens relatifs aux mouvemens de la population dans les diverses contrées civilisées est M. Bodio, le très savant chef de la statistique italienne, il les tient à jour ; c’est à ses tableaux qu’il faut se reporter. Nous avons, grâce à lui, la comparaison année par année des naissances, des décès, des mariages, avec tous les détails utiles circonstanciés : l’âge, par exemple,

  1. Voir notre Précis d’économie politique, 1re édition, 1887, p. 342.