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subit presque à bout portant le feu de la première ligne de Picton, embusquée dans les blés. La colonne s’arrêta, oscilla. Picton, voyant l’hésitation des Français, les fit aussitôt charger à la baïonnette par la brigade Kempt, qui les repoussa sans reprendre haleine jusque près de Gémioncourt. Là cependant, mitraillés par les batteries de Bachelu et fusillés par le 108e de ligne resté en réserve, les bataillons anglais durent s’arrêter à leur tour et regagner au plus vite leurs premières positions. Dans leur retraite, ils soutinrent les charges des 1er et 6e chasseurs (division Piré). Les tirailleurs furent sabrés, mais les bataillons, rapidement ployés en carrés, ne se laissèrent point entamer. Le carré du 28e, menacé sur ses deux faces, semblait prêt à se rompre. Picton ranima ses soldats en criant : « 28e, rappelez-vous l’Espagne ! »

Les 42e (highlanders) et 44e, qui formaient la droite de Pack, furent moins heureux. Les lanciers de Piré, galopant à la poursuite des Brunswickois, aperçurent les habits rouges en bataille à l’angle des deux routes ; ils piquèrent droit sur eux et les rompirent partiellement. Baïonnettes contre lances, une furieuse mêlée s’engagea ; le drapeau du 44e fut pris et repris. Le colonel de Galbois, avec le 6e lanciers, perça jusqu’à la route de Namur, où il mit en pièces un bataillon hanovrien.


XII

Pour appuyer ce mouvement, Ney comptait sur les 20 500 hommes du comte d’Erlon ; qui ne pouvaient tarder à déboucher de Frasnes. Mais par un enchaînement de fatalités, ou plutôt par la conséquence logique de retards dans les dispositions préparatoires, d’ordres mal compris et mal exécutés et de contre-ordres inopportuns, ce corps d’armée tout entier allait lui manquer comme il avait manqué à Napoléon.

Dans la matinée, d’Erlon avait concentré ses cinq divisions à Jumet (2 kilomètres en arrière de Gosselies) où il était depuis la soirée de la veille avec la division Durutte. Le corps de Reille, sur lequel il devait serrer, ne bougeant pas de Gosselies, il attendit des instructions. Un peu avant 11 heures, il reçut l’avis de Reille de se préparer à suivre le mouvement du 2e corps ; Reille l’informait d’ailleurs que lui-même resterait dans sa position jusqu’à nouvel ordre. D’Erlon ne pouvait qu’en faire autant. Vers