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notions précédentes sans en faire ressortir une conséquence évidente. La pesanteur du fer, la grandeur de son poids atomique, lui auraient interdit l’accès de la molécule organique vivante, si cet excès de densité par rapport aux corps voisins n’était corrigé par l’association d’élémens légers et nombreux. Le fer entre donc dans la matière organique au milieu d’un immense cortège d’élémens qu’il traîne avec lui, qui le soutiennent et le font flotter on quelque sorte au sein de cette substance. Il est naturel que ses atomes, dont chacun est si copieusement escorté, ne puissent trouver place qu’en petit nombre dans les corps vivans. Aussi ne rencontre-t-on, en général, dans le corps des animaux, qu’une minime proportion de fer ; il en est un élément essentiel et cependant peu abondant ; c’est par dix-millièmes qu’il faut le compter. Le corps de l’homme, au total, n’en contient pas plus d’une partie pour 20 000 parties en poids. Le sang qui est le mieux pourvu à cet égard n’en renferme que 5 dix-millièmes (c’est-à-dire que 1 gramme de sang n’en possède que 0,5 milligramme) ; un organe est riche en fer lorsqu’il en renferme, comme le foie, 1,5 dix-millième. Il faudra donc, pour nous représenter les mutations du fer organique, soumettre à une sorte de transposition les idées que nous nous formons habituellement sur la grandeur et la petitesse des unités de mesure et sur le véritable sens des mots : abondant ou rare. Nous devons nous défaire de ce préjugé qu’un millième et à plus forte raison un dix-millième sont des proportions négligeables. L’humble dix-millième, qui d’ordinaire ne tire pas à conséquence, devient ici au contraire une valeur à considérer. C’est lui qui formera notre unité de mesure, notre base arithmétique et en quelque sorte un nouveau module pour nos évaluations. Les chimistes qui recherchent le fer dans les autres composés de la nature prennent pour point de départ le gramme : ils ont entre les mains, habituellement, quelque fraction de gramme du corps à analyser. Les méthodes dont il& disposent peuvent être regardées comme parfaites si elles ne laissent pas échapper plus d’un millième dans la quantité dont ils disposent. Et c’est en effet le cas pour les méthodes volumétriques ou pondérales à l’aide desquelles les chimistes dosent le fer dans les composés ordinaires. On conçoit que ces méthodes conviennent mal aux besoins des biologistes. Ils descendent plus avant dans l’infiniment petit, et il faut qu’ils s’y meuvent avec certitude. Il leur faut des balances qui tarent le millième de milligramme, comme ils ont déjà des