Page:Revue des Deux Mondes - 1898 - tome 145.djvu/684

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ce sont des réactions conformes à ce type que cherchèrent à découvrir les successeurs de Lavoisier, et, parmi eux, Liebig. Ils échouèrent dans leurs tentatives, mais leurs efforts eurent cependant cet heureux résultat de révéler, sinon le véritable rôle du fer dans le sang, du moins celui de la matière rouge où il est fixé.

La question de la présence du fer dans le sang ou, plus exactement, dans la matière colorante du sang avait donné lieu à de longs débats. Vauquelin l’avait niée. L’erreur de cet habile expérimentateur tenait à la supposition même qui avait dirigé sa recherche. Il avait procédé avec le sang comme il l’eût fait avec un composé minéral ; il y avait recherché le fer sanguin, le fer hématique, comme s’il existait à l’état de sel ferreux ou ferrique, c’est-à-dire en appliquant les réactifs habituels du métal ou le liquide même, à cru pour ainsi dire et sans calcination préalable. Le fait que ces réactions signalétiques du fer ne réussissent point prouve seulement que le fer n’existe pas dans le sang sous la forme que l’on supposait, à l’état de sel de fer connu. Les recherches ultérieures établirent en effet que le fer se trouve réellement et presque exclusivement dans la matière rouge qui teint les globules, mais qu’il y est engagé dans une combinaison compliquée, de manière qu’il échappe aux réactifs banals ; suivant l’expression usitée, il est dissimulé.

Cette combinaison compliquée était ignorée de Liebig, qui en faisait une combinaison de sel de fer (protocarbonate) et de matière organique. Elle ne fut connue qu’un peu plus tard. C’est seulement en 1864 qu’un chimiste allemand, Hoppe-Seyler, réussit à l’obtenir pure et cristallisée. Sans la connaître à fond et à l’état d’espèce chimique, on en apercevait déjà les propriétés essentielles et on en pouvait, avec une vraisemblance suffisante, indiquer le rôle. C’est ce que fit Liebig en 1847.

Toutefois, le fait seul qu’il n’y avait pas d’assimilation possible entre cette substance et les sels de fer, tranchait précisément et dans un sens négatif la question en suspens. Différente de ces composés elle ne pouvait se comporter comme eux et accomplir des combustions lentes exactement calquées sur le même type. Fait remarquable, et qui montre bien que le fer conserve à travers toutes ses vicissitudes quelque trait de sa propriété fondamentale de favoriser l’action de l’oxygène sur les substances, cette combinaison si particulière et si différente des sels de fer