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à douter que les plus grands des poètes ne soient quelquefois les savans.

Les lois de la météorologie présentent un important intérêt pratique parce qu’elles conduisent à la prévision du temps. Il n’est pas besoin de montrer le profit que trouverait l’humanité à pareille découverte. Combien de mauvaises chances évitées pour l’agriculteur ! La navigation ne ressentirait pas moins de bienfaits si l’on savait à l’avance les régions de calmes, de vents contraires ou favorables ; que de traversées abrégées, que de vies sauvées ! On en peut juger par les cyclones. Jadis l’effroi des marins, depuis que leurs lois sont connues, on les utilise pour hâter les voyages. L’ouragan dompté travaille pour le matelot, et quand on lui ordonne de ramener plus vite le navire au port, la tempête docile obéit et écarte les dangers de la route. Qui donc, parmi nos pères, eût osé faire un pareil rêve, réalisé cependant par les travaux de Bridet. Or les lois de l’océan aérien et de l’océan liquide sont les mêmes, quoique plus compliquées pour le premier que pour le second. Elles doivent par conséquent être étudiées synthétiquement d’abord sur la mer et appliquées ensuite à l’atmosphère, en y apportant les modifications nécessitées par le degré si différent de sensibilité des deux fluides. L’introduction rationnelle à la météorologie est l’océanographie. La vapeur a considérablement modifié et simplifié les anciennes conditions de la navigation, et les steamers s’avancent aujourd’hui presque en ligne droite en dépit du vent et de la mer. Cependant la marine à voiles n’est pas aussi morte qu’on serait tenté de le croire. Par suite des réactions mutuelles si délicates, si variables des conditions économiques, du prix élevé du charbon, du vaste espace occupé par les machines et l’approvisionnement du combustible, du salaire plus élevé des mécaniciens et pour d’autres causes encore, plusieurs nations en reviennent aux voiliers. Les Américains en particulier possèdent des clippers à grande vitesse, à bord desquels le fret est moins coûteux que sur les bâtimens à vapeur. L’étude des phénomènes de l’Océan n’a donc rien perdu de son utilité pratique en navigation et il devient indispensable d’élucider une foule de points. Les courans marins tiennent à la météorologie grâce à la concordance si complète qui existe entre la marche des eaux et les directions suivant lesquelles soufflent les vents réguliers. Ils règlent le régime des glaces flottantes. On sait combien les navires sont en