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suis pas un esclave de ma richesse… Je briserai la chaîne d’or que le sort capricieux m ? a imposée en héritage…

Il ne réclame d’autre droit que celui de conquérir le cœur de Flora.

La scène suivante nous montre la belle-mère d’Harold Freeman, la seconde femme de son père, qui s’effraye des projets humanitaires du jeune homme. Cette dame incarne, sous la plume de l’écrivain socialiste, ces favorisés de la fortune, qui, entièrement ignorans des lois économiques, comme le sont d’ordinaire les femmes, croient naïvement que des revenus sont indispensables à l’existence. Elle est convaincue qu’un changement de vie et de classe serait un malheur pour son beau-fils et pour elle par contre-coup, car elle possède une part dans l’usine. « Il faudrait, dit-elle, nous refuser le « luxe » le plus « indispensable » de la vie de chaque jour… et que penserait de lui la haute société dans laquelle il va bientôt paraître ? »

Harold rachète à sa belle-mère les intérêts qu’elle a conservés dans la fabrique, afin de reprendre sa liberté d’action. Et, ce qui est assez inattendu, l’Ecossais Wilson, jusque-là conseiller raisonnable, mais bienveillant pour Harold, demande alors la main de Mme Freeman qu’il obtient aussitôt. Il semble ainsi se ranger à l’opinion de sa future épouse sur les rapports qui doivent exister entre le capital et le travail.

Le troisième acte met en scène la fête du 1er Mai, sur les prairies de Dornenau. Flora s’avance d’abord, pour exprimer, au nom de ses compagnes, les sentimens des femmes du prolétariat.

Elle demeure fidèle à la consigne du parti marxiste, développée par Bebel dans la Femme, et récemment précisée par Mme Zetkin au congrès de Gotha. Elle proclame en effet la subordination de toutes les revendications propres à son sexe au triomphe préalable de la cause socialiste. Elle sacrifie pour le présent les intérêts de la femme à ceux de la classe ouvrière en général. « Contraintes par l’inhumanité de l’état de choses actuel à devenir vos concurrentes, dit-elle en s’adressant aux hommes, nous sommes pourtant résolues à combattre côte à côte avec vous l’organisation sociale impitoyable qui nous a faites ce que nous sommes… Nous voulons offrir à la jeunesse l’exemple de la simplicité, de la vertu et du courage, la remplir de haine contre