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Cette série d’explorations au pas de course déterminait l’Allemagne à s’accorder avec nous le 23 juillet 1897. Elle renonçait à atteindre le Niger ; nous cédions en échange quelques points déjà occupés. Cette convention, la meilleure qui ait été signée pour l’Afrique, terminait nos conflits coloniaux avec l’Allemagne. C’était prévu : la politique anti-anglaise suivie par l’empereur Guillaume jusqu’aux affaires de Chine, devait l’amener à faire à la France toutes les concessions compatibles avec l’honneur allemand. Mais l’Angleterre n’a pas encore signé, inutile lenteur. La frontière est fixée de la côte au 9e parallèle. De la zone neutre nous ne demandons rien, sauf peut-être une frontière naturelle et non géométrique. Quant au nord-ouest de la Côte d’Or, le lieutenant Baud Ta clos, dès 1895, par une série de traités. Les Anglais ont bien occupé Bouna de ce côté, mais sans droit : elle est notablement à l’ouest de la frontière fixée en 1894. L’équité du gouvernement anglais lui fera rendre Bouna, comme il a déjà fait pour Bondoukou ; le cas est le même.

Au nord de la zone enfin, nous avons reconnu l’Allemagne. Les Anglais s’entendront-ils avec elle ? Ils occupent encore Gambakha, allemand à nos yeux, et viennent à peine d’évacuer la zone neutre envahie contre tout droit. Mais l’ordre d’évacuation, l’attitude de l’Angleterre lors de l’occupation de Kiao-Tcheou, l’accord anglo-allemand pour l’emprunt chinois, tout indique un revirement, peut-être momentané : l’Angleterre s’incline partout devant sa rivale pour avoir carte blanche en Égypte. Si les Allemands n’obtiennent pas la zone neutre, ils auront mal joué.

Reste à savoir comment l’Angleterre traitera Samory ; ses commerçans l’ont armé déjà ; il a donc pu massacrer des centaines de mille hommes. L’Angleterre soutiendra-t-elle toujours un tel monstre, même contre nous ? Elle le peut d’autant moins qu’il est protégé français, en dépit de ses révoltes, et qu’elle doit craindre pour sa Côte d’Or le sort dont elle est responsable pour notre Soudan.


IV

Mais la question la plus grave est celle du bas Niger. C’est en 1883 que nous réoccupons Porto Novo. En 1889, nous le séparons du territoire anglais voisin, par une frontière géométrique jusqu’au 9e parallèle. Avec l’Allemagne, à l’Ouest, nous traçons une