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course de la piraterie. Le pirate arme sans autorisation de son gouvernement ; c’est un voleur de mer : il est réputé l’ennemi du genre humain (communis hostis gentium), il est excommunié, dénationalisé, hors la loi. Les corsaires se proposent, sans doute, comme les pirates, de mettre la main sur les navires marchands de l’ennemi et sur leurs cargaisons ; mais leurs prises doivent être attribuées par des tribunaux réguliers : ce qui les caractérise, c’est qu’ils reçoivent une commission de l’autorité publique. L’Etat lui-même utilise leur concours.

Le 23 avril, à la suite d’une communication officielle faite aux deux Chambres italiennes par M. Visconti-Venosta, le député Fasco et le sénateur Camporeale exprimèrent le vœu que l’Espagne suivît l’exemple des États-Unis. Mais ce vœu ne fut point exaucé. Le décret espagnol publié le 24 avril par la Gazette de Madrid contient la disposition suivante : « Le gouvernement espagnol, maintenant son droit de concéder des patentes de course qu’il s’est réservé dans la note adressée par lui à la France le 16 mai 1857, organisera pour le moment avec des navires de la marine marchande des croiseurs auxiliaires de la marine militaire, qui coopéreront avec celle-ci aux nécessités de la campagne et seront placés sous la juridiction de la marine de guerre. »

Si l’on suppose que, de deux États belligérans, l’un n’ait pas ou presque pas de commerce maritime, l’autre importe ou exporte par mer beaucoup de marchandises, le premier peut avoir un grand intérêt à la pratique des armemens en course. Il ruinera d’autant plus sûrement son adversaire qu’il pourra saisir et capturer plus de navires marchands avec leurs cargaisons. La totalité des marchandises importées par l’Espagne atteignait 748 986 377 francs en 1896, 793 341 121 francs en 1897 ; les exportations n’ont pas dépassé 892 328 618 francs en 1896, 924 936 947 francs en 1897. La totalité des marchandises importées par les États-Unis atteint 823 millions de dollars pour l’année fiscale 1895-1896, 856 millions de dollars pour l’année 1896-1897 ; pour les mêmes périodes, le chiffre des exportations s’élève à 1 054 millions et à 1 151 millions de dollars. L’Espagne, d’après la statistique de 1895, n’a que 427 steamers jaugeant 313 178 tonnes, et 1 041 voiliers jaugeant 172 729 tonnes. La flotte marchande des États-Unis, d’après la statistique de 1897, comprend 13 904 voiliers jaugeant 1 904 153 tonnes et 6 599 steamers