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population de la Nouvelle-Calédonie a beaucoup augmenté depuis quelques années, qu’elle est aujourd’hui d’environ 13 000 à 14 000 habitans, et que la proportion des hommes aux femmes serait de 60 à 40 pour cent. Mais ce sont là des conjectures. En tout cas, le déficit est patent.

En Cochinchine, la population française était, à une date assez récente, de 3891. Aucun renseignement n’est donné par les documens officiels sur la proportion relative des hommes et des femmes, sauf à Saïgon, où il y a 1345 hommes et 403 femmes seulement.

Au Tonkin, la population civile européenne se composait, en 1894, de 1 494 hommes et de 416 femmes, soit en tout 1 910 habitans. En 1896, elle était de 2 779. Quelle est sur ce nombre la proportion des femmes ? Silence des documens officiels. Les gens bien renseignés l’estiment à peine à 30 pour cent.

Silence plus complet encore en ce qui concerne l’Annam. Le seul renseignement, c’est que la population civile était, en 1896, de 359 habitans. La proportion des femmes ne dépasserait pas 20 pour cent. Encore une fois, il est étrange que, sur une question aussi capitale, l’administration ne se pique pas de donner des renseignemens plus exacts. Mais, à relever tout ce qu’il y a d’étrange dans notre administration coloniale, cet article se rallongerait singulièrement.

Si la plupart de nos colonies manquent de femmes, et si leur développement s’en trouve sensiblement ralenti, comment déterminer les femmes à s’y rendre ? C’est la question que l’Union coloniale française s’est proposé de résoudre. Le moyen qu’elle a trouvé a été de créer une société d’émigration féminine, et c’est à démontrer l’utilité de cette création que M. Chailley-Bert a consacré sa conférence. Mais cette question, intéressante assurément, peut encore être envisagée à un autre point de vue que celui de l’expansion coloniale. S’il y a disette de femmes aux colonies, il y a pléthore en France, au moins dans certaines professions. Les non-classées, dont nous venons de voir le nombre, n’y pourraient-elles pas trouver un débouché ? Certains emplois, convenant à leurs aptitudes, ne s’offriraient-ils pas à elles, là-bas, et, tandis qu’elles meurent de faim à Paris, ne seraient-elles pas largement rétribuées à Hanoï ou à Nouméa ? La question coloniale se doublerait ainsi d’une question sociale et charitable, qui aurait bien aussi son intérêt. Cette considération