provoqua dans l’extrême droite de nouvelles colères et d’ardentes protestations. On accusait le cabinet d’avoir rompu l’équilibre constitutionnel, « alors qu’en réalité, disait Decazes, il l’a rétabli ». ’ Monsieur était comme un homme « aux yeux de qui la foudre vient d’éclater » et sa douleur égalait son ressentiment : « Je ne conseille ni à toi ni à aucun de tes collègues, mandait le Roi à Decazes, après la publication de l’ordonnance, d’aller demain ailleurs que chez moi et chez le Duc d’Angoulême. Chez tout autre, il ne ferait pas bon. Monsieur a dit au Duc d’Angoulême :
« — Voilà le commencement de l’enterrement de notre famille.
« Le Duc d’Angoulême croit qu’il m’en parlera. Je le crois aussi ; mais ce ne sera pas pour aujourd’hui. Il est venu comme à l’ordinaire. Il était plus que sérieux. Je m’attendais qu’il allait m’annoncer une conversation. Cela n’a pas été. Je suppose qu’il ne se sent pas encore assez maître de lui. Peut-être aussi se contentera-t-il de m’écrire ; je le préférerais. La Duchesse d’Angoulême a pleuré devant son mari. Plus maîtresse d’elle-même que son beau-père, il n’y paraissait plus quand elle est venue chez moi. Mais, excepté la physionomie du Duc d’Angoulême, je n’en ai vu aucune ce matin qui ne fût triste. »
Cette tristesse, le Roi était bien près de la ressentir. Il ne se dissimulait pas la gravité de l’acte qu’il venait d’approuver et de revêtir de sa signature. La légalité n’en était pas contestable ; il n’avait fait qu’user de sa prérogative royale. Les nominations auxquelles les circonstances l’avaient décidé, réclamées par l’opinion, justifiées par le mérite et les services des élus, auraient dû nécessairement avoir lieu tôt ou tard. Mais n’en pouvait-on contester l’opportunité ? En consommant la rupture entre l’extrême droite et le cabinet, n’avaient-elles pas jeté le gouvernement trop à gauche et n’allait-il pas devenir prisonnier des ultra-libéraux ? Le 16 mars, dix jours après l’ordonnance, le Roi écrit : « Je crois que les nouveaux Pairs nous assurent la majorité dans leur Chambre ; j’espère que la proposition Barthélémy sera rejetée par celle des Députés. Mais, quel frêle avantage ! Sommes-nous sûrs qu’il se représentera dans d’autres occasions, peut-être plus importantes, et cette majorité, assez peu considérable, de la Chambre des Pairs, combien de temps la conserverons-nous ? Il fut un temps où cette Chambre était notre palladium, où nous nous étonnions qu’un tiers tout au plus des voix portât Chateaubriand au