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Page:Revue des Deux Mondes - 1898 - tome 148.djvu/73

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conférence de Constantinople, le protocole de Londres, la circulaire Salisbury, le mémorandum Schouvalof, le congrès de Berlin, la convention de Chypre. Quand, tous deux chevaliers de la Jarretière, Beaconsfield et Salisbury revinrent de Berlin aux acclamations d’une foule enivrée et jetèrent aux quatre vents des cieux la formule triomphante : Peace with honour, la farce était jouée. Il ne restait plus qu’à faire toucher du doigt le mensonge, en même temps que le péril, d’une politique qui venait encore de coûter au pays la guerre de l’Afghanistan.

Les élections de 1880 furent la revanche de celles de 1874. Gladstone avait mené avec un éclat incomparable la campagne dans le comté écossais du Midlothian. Il était le vrai, l’unique vainqueur de la bataille. Une intrigue de cour et de coulisse n’en tenta pas moins de l’exclure du bénéfice de la victoire. Titulairement, lord Hartington était toujours le leader des libéraux. La Reine se prêta à la mauvaise plaisanterie de lui offrir le mandat de former un cabinet et de le présider. Le marquis eut le mérite de refuser cette proposition : il eut le tort d’hésiter un instant. Gladstone forma rapidement un ministère où il fit entrer M. Chamberlain, arrivé en six ans au premier rang comme champion inflexible de l’ultra-radicalisme et sir Charles Dilke, fort assagi depuis ses orageux débuts. L’histoire du second ministère Gladstone peut se résumer en ces termes : un gouvernement de réformes intérieures, détourné de sa voie par une crise révolutionnaire en Irlande et par un accident international en Égypte. A l’Irlande revient l’honneur d’avoir, non seulement entravé la marche du gouvernement durant ces cinq années, mais encore imprimé à l’esprit sans cesse en mouvement de Gladstone l’impulsion finale. L’Irlande, ce fut Parnell. Cet homme mystérieux était pétri de contrastes. Il était Anglo-Saxon, protestant et aristocrate de naissance : il se fit le serviteur passionné de l’Irlande celte, de son église et de sa démocratie. Capable de faire vibrer les cordes les plus profondes de l’âme populaire, il s’enveloppait d’une réserve glaciale. Le plus réaliste des hommes d’État, il se voua à la défense d’un idéal proscrit. Le plus calculateur des stratégistes politiques, il finit par échouer sur l’écueil banal d’un adultère bourgeois. C’est lui qui fit du home rule le pôle de la politique anglaise pendant quinze ans. Plutôt révolutionnaire et fenian de tempérament et d’instinct, il se consacra à la lutte légale et constitutionnelle. Son génie fut de s’emparer des