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atteignent presque la crête sans rencontrer aucune infanterie. Ils marchent vers le chemin d’Ohain, éloigné d’eux à peine d’une portée de pistolet. Soudain, à vingt pas se dresse un mur rouge. Ce sont les 2 000 gardes de Maitland, rangés sur quadruple profondeur. Ils attendaient, couchés dans les blés. Au commandement de Wellington lui-même : « — Debout, gardes, et soyez prêts ! » ils se sont relevés comme mus par un ressort ; ils mettent en joue, ils tirent. Leur première décharge fauche 300 hommes, près de la moitié des deux bataillons déjà décimés par l’artillerie. Le général Michel tombe frappé à mort. Les Français s’arrêtent, leurs rangs rompus, leur marche obstruée par les cadavres. Au lieu de les lancer instantanément à la baïonnette sans s’inquiéter du désordre où ils se trouvent, les officiers s’efforcent de les former en ligne pour répondre au feu par le feu. La confusion augmente. Le déploiement s’opère mal et à grande perte de temps. Pendant dix minutes, les chasseurs restent sur place sous la fusillade des gardes de Maitland et sous la mitraille des batteries Bolton et Ramsay, qui les prend en écharpe. Wellington voit enfin la garde fléchir ; il commande de charger. « — En avant ! mes garçons, crie le colonel Saltoun, c’est le moment ! » Les 2 000 Anglais courent baïonnettes croisées sur cette poignée de soldats, les enfoncent et descendent mêlés avec eux dans un furieux corps-à-corps jusque près du verger de Hougoumont. « Les combattans étaient si mêlés, dit un officier de la batterie Bolton, que nous dûmes cesser de tirer. »

Aux commandemens précipités de leurs chefs, les Anglais font brusquement halte. Le bataillon du 4e chasseurs (échelon de gauche) s’approche pour dégager ce qui reste du 3e chasseurs et du 4e grenadiers qui a suivi la retraite de celui-ci. Sans attendre le choc, les soldats de Maitland lâchent pied en désordre et remontent sur leurs positions au moins aussi vite qu’ils en sont descendus. Chasseurs et grenadiers les suivent de près, gravissant la cote sous les volées de mitraille. Ils franchissent le chemin d’Ohain lorsque la brigade Adam (52e, 71e et 95e régimens), qui s’est vivement portée en potence sur leur flanc gauche, les écharpe par des feux de quatre rangs. Les gardes de Maitland font demi-tour et, tant bien que mal reformés, recommencent à tirer de concert avec la brigade Colin Halkett, tandis que les Hanovriens de William Halkett débouchent des haies de Hougoumont et fusillent les Français par derrière. De tous côtés, les