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LA SCULPTURE DE PORTRAITS EN GRÈCE
ET L’ART MODERNE

L’antiquité n’est plus guère à la mode, peut-être pour avoir été trop en faveur autrefois. On lui fait payer aujourd’hui l’admiration excessive et un peu maladroite de nos pères. Ce discrédit ne sera-t-il que passager et de meilleurs temps reviendront-ils pour elle, ou au contraire doit-elle se résigner à se voir dépossédée de la direction des esprits ? Il est certain que la crise est grave. Attaquée en matière d’éducation universitaire, en matière d’éducation artistique, battue en brèche de tous côtés, la tradition classique menace de s’écrouler. Cependant, jamais les écrivains de la Grèce et de Rome n’ont été étudiés avec plus d’intelligence qu’à notre époque, avec une critique plus sagace, avec une indépendance de jugement plus entière. Jamais, non plus, il n’a été mieux permis, grâce aux récentes découvertes de l’archéologie, d’apprécier à son exacte valeur l’art ancien. Il faut donc, puisque des circonstances aussi favorables ne profitent pas à l’antiquité, que le courant soit bien fort qui détourne d’elle. C’est qu’on veut être de son temps à tout prix : comme si la meilleure manière de marcher en avant n’était pas quelquefois de regarder en arrière, comme s’il ne fallait pas s’instruire d’abord du passé pour faire mieux que lui dans l’avenir. — Mais il y a du parti pris. On ne veut pas toujours, avant de juger le passé, s’en instruire ; et, par exemple, ces découvertes de l’archéologie où l’art moderne pourrait trouver des enseignemens, l’art moderne trop souvent les ignore. L’art grec, cependant, a été comme un autre art, comme l’art français, plus que l’art français, doué du changement et de la vie. Si le mot d’évolution s’applique quelque part, c’est