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doit attendre, pour prendre son essor, qu’une autre ait également pris le sien. Si le métal a eu jusqu’à présent et depuis trente ans tant de détracteurs, c’est qu’indépendamment des défauts qu’on lui attribuait au point de vue esthétique, on n’entrevoyait pas encore toutes les facilités qu’il offre sous le rapport de la décoration des édifices. La construction n’est pas tout pour l’architecte : celui-ci doit, en outre, faire une œuvre d’art et trouver, dans le mode d’emploi des matériaux dont il dispose, les élémens du Beau. « La beauté de l’édifice résulte de la parfaite harmonie entre les moyens employés et le but cherché, et de l’accord qui en résulte entre toutes ses parties. Elle existe même dans un bâtiment si l’on saisit du premier coup le pourquoi de chaque chose. La décoration est l’ensemble des motifs inutiles à l’existence de la construction et qui ne tendent qu’à charmer la vue. Elle pourrait disparaître sans entraver l’usage normal de l’édifice, car elle n’en est pas partie intégrante[1]. » Comme complément de cette judicieuse distinction, on peut dire qu’il existe un lien étroit entre la forme, la matière, la destination et le système décoratif. C’est pourquoi le fer devait provoquer fatalement un retour à la polychromie. Les opinions émises par M. Sorel, à propos des recherches de M. de Baudot, dans un remarquable article de la Revue scientifique[2], confirment pour nous cette vérité : « Parmi les matériaux, dit cet écrivain, que l’industrie moderne produit d’une manière vraiment supérieure et originale, il faut mettre au premier rang les produits vitreux. On a déjà bien des fois essayé de les utiliser dans la construction en fer, mais ils se lient très mal avec les formes adoptées ; on n’en comprend plus la raison d’être. Il en est tout autrement quand on les applique sur le ciment frais ; l’adhésion est parfaite et l’harmonie ne laisse rien à désirer, puisque ces matières ont toujours été associées aux enduits, comme leur couverte naturelle et leur complément décoratif indispensable. » Depuis trois ou quatre ans, nous voyons le verre servir ainsi à la décoration extérieure ou intérieure comme panneaux de revêtement.

Un artiste de grand mérite. M. J. Galland, qui a décoré de cette manière la façade d’une maison de la rue de Babylone, à Paris, a exposé au Salon du Champ-de-Mars, cette année, une série de plaques en verre opalin où le charme des couleurs bigarrées

  1. Voir l’étude de M. A. Villenoisy : l’Architecture en fer, dans la Revue des Arts décoratifs (1897).
  2. 25 mai 1895.