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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 décembre.


Le discours que sir Edmund Monson a prononcé il y a quelques jours, au banquet annuel de la Chambre de commerce anglaise de Paris, a produit partout une stupéfaction qui n’est pas encore complètement dissipée. On se demande quelle a été l’intention de l’orateur. Il a fait savoir depuis, par une note communiquée à une agence, que son intention avait été bonne, et que son attitude antérieure ne permettait pas de croire qu’il ait pu en être autrement. L’expression avait peut-être trahi sa pensée, ou ne l’avait pas traduite d’une manière assez claire ; mais cette pensée était tout amicale. Nous le voulons bien. Sir Edmund Monson a, en effet, le droit de rappeler que, depuis qu’il représente la Reine à Paris, il a compris et rempli son rôle dans un véritable esprit de conciliation. Au cours de la dernière crise, tout en exécutant avec fermeté les instructions qu’il avait reçues, il a évité ce qui aurait fait inévitablement dégénérer en conflit une controverse délicate et pénible. Mais ces souvenirs, loin de nous aider à comprendre son discours, contribuent plutôt à le rendre inexplicable. Si les Anglais qui éprouvent encore pour nous des sympathies et qui, par leur situation même, sont obligés à notre égard à une plus grande réserve, sont amenés, sans le faire exprès, à tenir un pareil langage, que faut-il penser des autres ? Toutefois, nous ne voulons rien exagérer. Les explications que sir Edmund Monson a données à l’Agence Havas doivent, en ce qui le concerne, mettre fin à l’incident. Sa personne est désormais hors de cause. Nous n’en sommes que plus à l’aise pour apprécier une manifestation qu’il a, dans une certaine mesure, désavouée.

Peut-être a-t-il seulement cédé à cette manie sermonneuse qui est dans le caractère de sa race. Les Anglais sont volontiers pédagogues. M. de Bismarck, dans ses Pensées et Souvenirs, répète souvent que, lorsqu’il comptait le plus sur leurs sympathies, et aussi lorsqu’il