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reçu ni direction ni concours d’aucune sorte. Il y en eut qui ne se résignèrent pas à faire le métier ingrat auquel ils étaient conviés. Sans attendre la maigre manne des subsides officiels, ils acquirent de leurs propres deniers ce qui leur parut le plus indispensable. Ce sacrifice, il convient d’en savoir grand gré à ceux qui se le sont volontairement imposé ; mais vraiment, on ne pouvait, en toute justice, ni l’espérer, ni l’exiger de tout le corps enseignant.

En général, on n’eut pas tant de zèle ; on ne se piqua pas d’être plus royaliste que le roi. Le ministre paraissait disposé à se contenter de peu ; on le prit au mot. Les grandes villes offraient quelques ressources ; on y consulta les ouvrages qui traitaient de l’histoire des Beaux-Arts. Charles Blanc surtout fut mis à contribution. Beaucoup de bibliothèques municipales possédaient l’Histoire des Peintres, cette compilation très inégale où il y a des parties d’une réelle valeur ; mais ce qui se trouvait même dans la plus petite sous-préfecture, c’était la Grammaire des arts du dessin. Directeur des Beaux-Arts après 1870, Charles Blanc distribua son livre avec une royale prodigalité : il le concéda à toutes les bibliothèques de France et de Navarre, voire même aux simples particuliers qui, par la nature de leurs travaux, semblaient avoir quelque titre à cette faveur ; je me souviens d’en avoir reçu, pour ma part, deux exemplaires.

On avait donc partout cet ouvrage sous la main, et, bien qu’il s’intitule modestement Grammaire, il était mal fait pour initier à ces études ceux qui les abordaient pour la première fois. Si le critique n’est point sans avoir des vues personnelles et souvent intéressantes sur la matière qu’il traite, son style est ambitieux et laborieux. La prétendue Grammaire ne présente d’ailleurs que des considérations générales sur les conditions de développement et le caractère des différens arts ; elle n’offre point un résumé, même très sommaire, de leur histoire. Ce résumé, on le demanda surtout à la série des manuels, dont se compose la Bibliothèque de l’Enseignement des Beaux-Arts, qui se publiait sous la direction de M. Jules Comte. En 1891, bon nombre de ces manuels avaient déjà paru ; les autres ont suivi depuis lors ; la collection comprend aujourd’hui cinquante-cinq volumes in-8o. Tous ces traités n’ont pas la même valeur. Quelques-uns sont excellens de tout point et les plus savans trouvent à y apprendre. Beaucoup sont très dignes d’estime ; un petit nombre ont prêté