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« guildins, » trottant « un certain amble avec lequel ils avançaient merveilleusement. » Elle nous était, dès le commencement du XVIIe siècle, très supérieure : un voyageur anglais vante les chevaux hongres et les « bidets très fins » de Henri IV, mais ajoute qu’ils ne peuvent se comparer pour la vitesse ni pour la beauté des formes aux chevaux de chasse de son roi.

Le goût et l’usage des courses étaient également en faveur de l’autre côté du détroit, longtemps avant que les Français en eussent nulle idée encore. Le premier match mentionné par M. le comte Gérard de Contades, dans sa Bibliographie sportive, eut lieu au village de Boulogne, en 1661. Le duc de Joyeuse et le prince d’Harcourt firent lutter deux chevaux, nourris depuis un mois, affirme le chroniqueur, à la mode d’Angleterre, « de pain fait avec anis et de féveroles au lieu d’avoine » et, durant les derniers jours avant l’épreuve, « d’œufs frais au nombre de 2 ou 300. » Le « gage » ou pari était de 4 000 écus, — une douzaine de mille francs de nos jours, — et le parcours à effectuer allait de la barrière de la Muette au château de Madrid. M. d’Harcourt montait en personne, « vêtu d’un habit fait exprès et très étroit, » ses cheveux enfermés dans un bonnet et « ayant trois livres de plomb en poche, pour peser autant que M. du Vernet, maître d’académie, » qui montait pour le duc de Joyeuse et gagna de cent pas.

Un prix de 1 000 pistoles — 30 000 francs actuels — fut remporté vingt ans plus tard, à Saint-Germain, par le duc de Monmouth, courant sur un cheval de l’honorable Thomas Warton. Le Roi était présent et proposa au propriétaire de lui acheter cette bête pour la somme qu’il lui plairait de fixer. L’Anglais refusa de la vendre, mais offrit d’en faire cadeau au monarque qui, de son côté, ne voulut pas en accepter le don gratuit.

Les Mémoires du marquis de Sourches relatent, vers la même époque (1684), un autre match au dénouement fort agité, entre deux chevaux appartenant à des personnes princières, MM. de Vendôme et d’Armagnac, grand écuyer de France, dont le champion arriva premier. Les parieurs du côté Vendôme, — il y avait déjà des parieurs et déjà il leur répugnait de perdre, — prétendirent que le palefrenier qui montait leur favori s’était laissé corrompre par les émissaires de l’autre côté. Sur quoi, le duc de Gramont ayant dit des sottises à « Monsieur le Grand, » celui-ci répliqua par un coup de poing et lui arracha sa perruque. Les