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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 juillet.


Pendant ces derniers mois, l’attention publique s’est attachée, non sans anxiété, aux affaires du Transvaal. Il s’en est fallu de peu que la guerre n’éclatât entre l’Angleterre et la République Sud-Africaine, et cela grâce à M. Chamberlain, qui n’en est pas à son coup d’essai et qui a déjà donné au monde plusieurs de ces alertes. Cette fois, comme les précédentes, tout pourrait encore se bien terminer. Il faut le souhaiter au nom des intérêts très divers qui s’agitent au sud de l’Afrique et auxquels quelques-unes au moins des puissances européennes ne sauraient rester indifférentes. Ni l’Allemagne, ni la France ne peuvent assister tout à fait impassibles à une extension nouvelle de l’Empire britannique dans ces régions, et l’empereur Guillaume l’a suffisamment prouvé, en ce qui le concerne, par le télégramme retentissant qu’il adressait, il y a quelques années, au président Krüger, à la suite du raid de Jameson. L’Allemagne est voisine des possessions africaines de l’Angleterre au nord-est et à l’ouest, et, si ces possessions se développent encore par l’absorption du Transvaal aujourd’hui, de l’État libre d’Orange demain, des territoires portugais après-demain, comment oublier nous mêmes que Madagascar n’en est séparée que parle canal de Mozambique ? Lorsque les petits peuples disparaissent, c’est toujours pour grossir les grands, et, lorsque les grands le sont déjà à l’excès, l’inconvénient est encore plus sensible.

Convenons d’ailleurs que le Transvaal, dans ces derniers temps, a très mal secondé l’intérêt que nous lui portions ; et c’est pourquoi, au cours de la crise qu’il vient de traverser, il n’a pas retrouvé en Europe, même auprès des puissances qui font pour lui les vœux les plus sincères, la chaleur et la spontanéité des sentimens d’autrefois. Parmi les griefs que l’Angleterre soutenait contre lui, quelques-uns étaient fondés. Il est certain que, par la faute des Boers, la situation des uitlanders était devenue intolérable. Des entraves de toutes sortes étaient mises à l’exercice de leur industrie ; les impôts les plus lourds pesaient sur eux ; les monopoles les plus écrasans les obligeaient à payer un