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Quel que soit l’éclat que jettent sur les possessions britanniques de l’Afrique australe les mines de diamant et les mines d’or, on peut être assuré que, par sa situation d’abord, puis par ses ressources agricoles, notre domaine nord-africain l’emporte et l’emportera de plus en plus sur le domaine sud-africain de la Grande-Bretagne. Nous ne sommes pas, dans l’Afrique méditerranéenne, campés comme au Sénégal et au Congo, nous y sommes solidement et puissamment établis. Outre 5 millions et demi de population indigène, soumise et paisible, sinon dévouée, nous y comptons plus de 600 000 Européens, dont les trois cinquièmes appartiennent à notre nationalité. Nous y entretenons plus de 60 000 hommes de troupes à l’état permanent, dont les quatre cinquièmes sont européennes.

L’Algérie et la Tunisie sont, d’ailleurs, des contrées plantureuses, produisant à foison toutes les denrées de l’Europe méridionale et de l’Europe centrale. Non seulement elles se nourrissent et s’approvisionnent elles-mêmes, ainsi que les troupes qui les gardent, mais elles exportent des quantités énormes de produits agricoles et de matières brutes diverses, nécessaires à l’industrie ; dans les années normales, ces exportations portent sur trois ou quatre millions de quintaux de blé, quatre ou cinq millions d’hectolitres de vin, plus d’un million de moutons, soixante ou quatre-vingt mille bœufs, près d’une centaine de mille quintaux de laine, puis du tabac en quantité, du minerai de fer, du minerai de zinc, de plomb, etc. Voilà donc des pays qui sont très avancés en culture, qui fournissent dans des proportions exubérantes, croissant chaque jour, toutes les denrées d’approvisionnement ; il serait facile d’y installer, pour compléter leur force au point de vue militaire, quelques fabriques de poudre et d’armes. L’Algérie est, en outre, absolument inattaquable du dehors ; on peut se livrer contre quelques-unes de ses villes à ces opérations d’ostentation que l’on appelle des bombardemens ; mais aucune force européenne ne saurait se risquer à effectuer une descente et à agir dans l’intérieur. La Tunisie, dont les côtes sont basses et où la population française est moindre, ne se trouve pas autant à l’abri de toute incursion de l’étranger ; néanmoins, appuyée sur la solide charpente de l’Algérie, pourvue aussi d’un réseau de chemins de fer qui s’étend chaque jour, elle offre une assez grande force défensive.

Ces deux contrées qui se joignent et, sauf des différences