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qu’elle versera à certaines banques désignées, partagera les bénéfices, dans une proportion déterminée, avec l’administration chinoise des chemins de fer. Pour la ligne de Newchwang, ce sera cette administration qui continuera à l’exploiter, mais elle sera flanquée, en vertu du contrat, d’un haut personnel technique européen et d’autres Européens pour diriger sa comptabilité et surveiller les dépenses et les encaissemens de recettes.

Que résulte-t-il de ces stipulations ? Qu’une société d’exploitation telle que celle du Pékin-Hankéou, dont le capital sera très limité, pourra faire de fort beaux bénéfices, et il n’y a rien là de blâmable ; mais les capitaux de construction, infiniment plus élevés, devront se contenter d’un intérêt fixe d’environ 5 pour 100, sans espoir de voir leurs titres, remboursables au pair par tirages, s’élever notablement. C’est un taux rémunérateur assurément, en ce temps de bas intérêt ; c’est à peine assez pour compenser les risques dont nous avons parlé ; et on en a jugé ainsi dans la partie de l’Europe même où les capitaux sont le plus hardis. Aussi les grands journaux financiers britanniques et ceux-là mêmes qui, d’ordinaire, pèchent plutôt par excès de hardiesse, se sont-ils montrés très froids à l’endroit des entreprises faites en Chine. La constitution de sociétés par actions offrant aux souscripteurs, en compensation des aléas défavorables, de larges chances de gain aurait été un meilleur moyen d’attirer les capitaux, et les obligations mêmes, émises par ces compagnies, auraient peut-être reçu un meilleur accueil que des emprunts d’Etat du vacillant gouvernement de Pékin. Sa durée est trop incertaine. D’autres peuvent le remplacer, ses possessions peuvent être partagées entre divers héritiers, et des événemens très récens ont clairement montré que les conquérans refusent souvent de se charger du passif de leurs conquêtes. Les fonds d’Etats malades courent de ce chef des risques plus grands que ceux des sociétés privées dont l’activité s’exerce sur leur territoire.

Si les lanceurs d’affaires se sont vite engoués de la Chine et si les représentans de syndicats qui rêvaient de la transformer comme par un coup de baguette magique ont encombré, dès le lendemain de la guerre sino-japonaise, les chambres de l’hôtel de Pékin devenue l’auberge des milliards, le public a été plus lentement qu’eux. Bien que les concessions aient été longues à obtenir, les émissions n’ont pu toujours les suivre de près. En fait, en dehors des chemins de fer russes de Mandchourie, qui