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et autant dans le Tien-tsin-Tching-Kiang, on arrive pour elle à un total de 3 300 kilomètres, La Russie vient ensuite avec 2 500 kilomètres en Mandchourie et dans le Chansi, puis l’Allemagne, avec 1 500 kilomètres pour son réseau du Chantoung et sa moitié de la ligne de Tien-tsin à Tching-Kiang. La France suit de près, devant construire près de 1 300 kilomètres, en lui attribuant 600 des 1 200 kilomètres de Pékin à Hankéou, dont les 600 autres reviennent à la Belgique. Les Américains enfin ont pour leur part 500 kilomètres du Canton-Hankéou. Le Japon ne s’est pas fait concéder de chemins de fer en Chine, mais doit en construire en Corée où il a déjà racheté aux Américains la courte voie ferrée qu’ils avaient construite entre la capitale Séoul et son port Tchemoulpo. Il a, d’ailleurs, comme les diverses nations que nous venons de nommer, des intérêts dans divers genres d’entreprises. La part de chacun nous semble ainsi équitable en dépit des cris de la presse britannique qui prétend l’Angleterre lésée, sous prétexte que les voies ferrées qui lui sont concédées ont une moindre valeur stratégique que les lignes russes. Mais la force de la Grande-Bretagne en Extrême-Orient n’est-elle pas dans sa flotte, qui lui assure la haute main sur le bas et le moyen Yang-tze, bien plutôt que dans une voie de terre quelconque et la fameuse « porte ouverte » a-t-elle jamais été fermée nulle part ?

Il semble que la Chine puisse ainsi rester, au moins pour un certain temps, une sorte de communal où les nations civilisées exerceraient simultanément leur activité économique, comme l’est un peu la Turquie, avec cette différence que l’Empire du Milieu est bien plus vaste, plus riche, habité par une population bien autrement dense, industrieuse et commerçante. Dans cette mise en valeur de la Chine, ce seraient naturellement les nations ayant le plus de capitaux qui devraient jouer le principal rôle, l’Angleterre, l’Allemagne et la France aussi, si nous savons ne pas nous montrer trop timorés, et ne pas poursuivre, dans une partie du monde où nos moyens d’action militaire sont malheureusement assez faibles, des visées politiques illusoires qui augmenteraient encore les difficultés de notre diplomatie, pourraient nous entraîner dans des luttes redoutables, et n’aboutiraient au mieux qu’à nous faire attribuer deux ou trois des provinces les plus pauvres et les plus difficiles à soumettre de la Chine. En répudiant au contraire formellement toute ambition de ce genre, en nous efforçant de jouer un rôle modérateur et conservateur, en