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en rapport direct avec la puissance choisie d’autre part, à l’effet de prévenir la rupture des relations pacifiques. Pendant la durée de ce mandat, dont le terme, sauf stipulation contraire, ne peut excéder trente jours, les États en litige cessent tout rapport direct au sujet du conflit, lequel est considéré comme déféré exclusivement aux puissances médiatrices. Celles-ci doivent appliquer tous leurs efforts à régler le différend. En cas de rupture effective des relations pacifiques, ces puissances demeurent chargées de la mission commune, de profiter de toute occasion pour rétablir la paix. »

Au demeurant, on n’avait pas obtenu, dans ce premier ordre d’idées, tout ce qui paraissait souhaitable aux amis de la paix. Est-ce à dire qu’on n’eût abouti qu’à des résultats apparens et que le projet initial du gouvernement russe eût avorté ? Nous ne le croyons pas, pour plusieurs motifs.

D’abord, c’est beaucoup que d’avoir à ce point grandi la sphère de la médiation. Se figure-t-on, par hasard, que nous en soyons encore aujourd’hui, sur cette question, au même point qu’après la rédaction du 23e protocole en 1856, après l’engagement isolé pris dans l’article 12 de l’acte général de Berlin en 1885 ? Ce serait absurde. L’idée nouvelle a pris une large place au soleil.

Ensuite on a fait un grand pas (tout le monde ne s’en est point aperçu) lorsqu’on a conféré définitivement aux puissances étrangères le droit d’offrir leur médiation aux États en conflit en ajoutant « que l’exercice de ce droit ne peut jamais être considéré par l’une ou l’autre des parties en litige comme un acte peu amical[1]. » Ce n’est là, sans doute, qu’une faculté. Mais qu’importe si diverses puissances, faisant grande figure dans le monde, sont décidées à user de cette faculté ? Tel ou tel médiateur, offrant ses bons offices sans y être obligé, a de grandes chances pour se faire entendre et, s’il se fait entendre, pour être écouté. Certes, chacun pouvait offrir ses bons offices, même avant la réunion de la Conférence, mais non pas de cette manière. La puissance qui voudra les offrir remplira désormais une fonction internationale et parlera, non pas seulement en son nom, mais de la part du monde civilisé. Ce résultat est précis, tangible, et la Conférence n’a pas perdu son temps.

  1. Art. 3 de la Convention.