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Quant aux obstacles opposés à la transmission par les objets inertes, les poussières, les marchandises, on en conçoit de deux espèces. Il faudrait, en premier lieu, exiger que la cargaison fût entreposée, immobilisée, aussi longtemps que le bacille conserve sa vitalité et sa virulence. Ce serait la quarantaine des marchandises, après la quarantaine des passagers. La science n’est malheureusement pas encore en mesure de nous faire connaître cette durée de survie du bacille pesteux, dans les diverses circonstances qui peuvent se présenter.

Le second moyen consisterait dans une désinfection rigoureuse de la cargaison. C’est celui que l’on se propose d’appliquer. Il est aléatoire, incertain, dans les cas où il est possible. Il y a bien des marchandises qui n’en permettent pas l’application. La prudence exige que le transport en soit interdit.

Quant à la transmission par les animaux qui constitue le danger le plus redoutable, on ne lui oppose à peu près rien que de vagues conseils de propreté et de soins hygiéniques.

Il est difficile de croire que cette organisation que tant de résistances aveugles ont empêché d’améliorer nous assure une immunité certaine. Si nous échappons au fléau, nous devrons quelque chose à l’heureux hasard et à la bonne nature.


XII

Sérothérapie de la peste. — Une dernière ressource nous restera cependant. Elle nous est fournie par la science : c’est la sérothérapie et la vaccination contre la peste.

La sérothérapie de la peste (emploi des sérums antipesteux), est l’exacte application à la peste du procédé qui a si bien réussi contre une autre maladie contagieuse, la diphtérie. C’est une opération à deux degrés ; elle se propose deux objets successifs. Le premier point est d’obtenir, par des moyens convenables, des animaux qui soient immunisés contre la peste. Ce résultat une fois acquis, on recueille le sang de ces animaux réfractaires au mal, — ou, mieux, une partie de ce sang, le sérum (sérum antipesteux), — et en l’injectant à l’homme pestiféré on prétend le guérir, ou, s’il n’est pas d’ores et déjà atteint, le rendre à son tour réfractaire au fléau.

Le premier essai de ce genre est dû à Yersin et à ses collaborateurs de l’Institut Pasteur : Roux, Calmette et Borrel. Il remonte