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Les troubles et les émeutes qui éclatèrent en 1839 et en 1842 dans les districts miniers et industriels des comtés de Lancaster, York, Durham et Monmouth, et auxquels prirent part même des enfans, appelèrent de nouveau l’attention des citoyens anglais sur la nécessité urgente qu’il y avait à faire pénétrer jusque dans les plus basses couches de la société les principes de la religion et d’une saine instruction.

Des hommes de tout culte étaient alors convaincus de l’efficacité de l’école pour l’amélioration morale du peuple. De là, une seconde marée montante de l’opinion publique en faveur de l’instruction primaire qui donna naissance aux Ecoles de déguenillés, aux Écoles industrielles et à l’extension des Écoles de workhouse.

Tous ceux qui sont au courant des œuvres de la philanthropie anglaise connaissent le nom de lord Shaftesbury. On sait qu’étant encore M. Ashley, il organisa cette Union des ragged schools[1], qui s’en allait ramasser dans les rues et les bouges de White-Chapel les enfans déguenillés et vagabonds, pour leur enseigner les élémens de l’instruction et les principes de la morale chrétienne. Dès 1844, la société avait ouvert à Londres vingt écoles : une dizaine d’années après, elle en comptait une centaine, donnant asile à près de 1 500 enfans. Plus tard, la charité ingénieuse de lord Shaftesbury habilla ces pauvres enfans d’un uniforme rouge, et leur fournit les outils nécessaires pour exercer le métier de décrotteur. Il lit mieux encore et, quand ces vagabonds d’hier furent un peu moralises et instruits, il facilita leur émigration dans les colonies, où la plupart devinrent de braves ouvriers. L’exemple a été suivi par le docteur Barnardo, dans la capitale, et, à Liverpool, par le Rev. Nugent, ancien aumônier catholique des prisons, et, de la sorte, on a transformé en une école d’apprentissage pour les colonies cette pépinière de voleurs et d’assassins.

Les Ecoles dites « industrielles » ont une origine analogue. Elles ont pour objet de prévenir la déchéance de l’enfant élevé par des parens vicieux, voire même abandonné à toutes les tentations de la rue. Il ne faut pas les confondre avec les Reformatories, ou « écoles correctionnelles. »

Tandis que ces dernières reçoivent des adultes mineurs de seize ans, déjà convaincus d’un délit entraînant la peine de la

  1. Eugène Rendu : De l’Instruction primaire à Londres dans ses rapports avec l’état social, Paris, 1883.