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politique devait lui donner la création d’un grand réseau restant sous sa domination. Sans se laisser décourager par les onéreux échecs du début, avec une persévérance que l’on doit admirer, elle est arrivée à créer et à développer, méthodiquement, sans bruit et sans arrêt, un réseau de câbles télégraphiques sous-marins qui couvre aujourd’hui le monde entier et l’enserre dans une immense toile d’araignée dont Londres est le centre. C’est là que les fils de cette toile convergent, et dans le monde, il ne se produit pas un incident, pas un fait politique ou commercial, dont la nouvelle ne soit d’abord transmise à Londres. C’est un merveilleux agent d’information et d’influence que l’Angleterre a entre les mains, agent d’autant plus redoutable que les autres pays en sont dépourvus.

Un simple examen d’une carte télégraphique montre l’enchaînement des câbles appartenant aux Compagnies anglaises ; explique certaines difficultés de notre politique coloniale ; et jette un peu de lumière sur des faits qui ont dû quelquefois paraître incompréhensibles.

Du côté de l’Amérique du Nord, dix câbles transatlantiques relient l’Angleterre au Canada et aux États-Unis. Plus bas, vers l’Amérique du Sud, trois autres lignes anglaises traversent l’Atlantique et rattachent le Brésil au Portugal, à l’Espagne, et, par leurs prolongemens, à Londres même ; d’autres lignes anglaises s’étendent du Nord au Sud, le long du Pacifique ; d’autres encore enveloppent toutes les Antilles et l’Amérique centrale, et complètent ce premier réseau qui met l’Amérique entière à quelques secondes de Londres.

Vers l’Orient, les lignes anglaises qui s’y dirigent, en partant de Londres, quadruplées sur certains points, tournent l’Europe par Gibraltar, touchent à Malte et à l’Egypte, longent la Mer-Rouge jusqu’à Aden.

A Aden se trouve ce qu’on peut appeler un nœud de lignes télégraphiques, dont l’importance politique se révèle aujourd’hui. De là, en effet, part un premier faisceau de trois câbles qui se dirigent vers l’Inde, et se prolongent par d’autres lignes jusqu’à la Chine, l’Australie et la Nouvelle-Zélande ; une autre ligne part du même point, se dirige vers la côte orientale d’Afrique en desservant Zanzibar, Mozambique, Delagoa Bay, Natal et le Cap de Bonne-Espérance. Ce grand réseau oriental a son point central, où toutes les lignes viennent se nouer, à Aden.