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IV

Le port de Nantes était déjà certainement en pleine activité à l’époque de la conquête, et on y faisait d’une manière toute spéciale le trafic des métaux. Dès la plus haute antiquité en effet, on exploitait la poudre d’or et l’étain un peu partout en Gaule, et principalement dans l’Armorique. Les navires phéniciens surtout, qui allaient chercher l’étain aux îles Cassitérides, devaient fréquenter nécessairement les escales principales de la Loire maritime ; et la poudre d’or était un des principaux élémens d’échange pour toutes les transactions commerciales. L’étain de son côté était alors, beaucoup plus que de nos jours, un objet de première nécessité. Allié au cuivre, il donnait le bronze ; et aux époques reculées où l’on connaissait à peine le fer et pas du tout l’acier, le bronze était le métal absolument indispensable à tous les usages de la vie, à tous les besoins de la guerre.

Il est à peu près impossible de savoir quelque chose de précis sur l’état du port de Nantes au commencement de notre ère. On peut cependant concevoir quelles facilités exceptionnelles devait offrir pour le mouillage des bateaux de faible tonnage le groupe des îles nantaises qui divisaient le grand fleuve en plusieurs bras et présentaient un développement de rives partout facilement accostables. Les premiers travaux de transformation ou d’aménagement paraissent avoir été exécutés vers le milieu du VIe siècle par l’évêque saint Félix, qui ouvrit, entre les prairies de Mauves et de la Madeleine, un large canal, auquel on a loyalement conservé son nom respecté. Le canal Saint-Félix continue à baigner le pied des hautes murailles du célèbre château des ducs de Bretagne, et est resté depuis quinze siècles le port fluvial de Nantes. Très heureusement situé presque au confluent de l’Erdre et de la Loire, il fut même pendant longtemps le centre principal de l’activité commerciale qui s’est légèrement déplacée, suivant la loi commune, en descendant le fleuve et se trouve aujourd’hui le long du riche quai de la Fosse. Nantes s’est ensuite peu à peu développé sur les coteaux de la rive droite, dans la plaine basse de la rive gauche et surtout dans ses grandes îles, aujourd’hui très peuplées et couvertes d’établissemens industriels.

En amont de la ville le fleuve se partage en deux grands bras : l’un, le bras de Pirmil, longe la rive Sud et se divise en plusieurs