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Europe représentait la part des indigènes. Dans les années 1868, 1869, 1870, l’exportation annuelle dépassa I million de quintaux, représentant sur le marché européen une valeur de 100 millions de francs.

À cette époque, les plantations de café, non compris les cultures des indigènes, couvraient une étendue de 170 000 acres ; la moyenne de rendement était de 5 quintaux par acre, ce qui donnait 175 à 250 francs par acre, soit 20 à 25 pour 100 du capital engagé. L’ouverture du chemin de fer de Colombo à Kandy, la main-d’œuvre à bon marché fournie par 4es inépuisables légions de travailleurs libres recrutés dans le sud de l’Inde, la facilité des transports, la fécondité du sol et le plus beau climat du monde, tout semblait présager une ère indéfinie de prospérité pour la culture qui, depuis 1837, avait pris un si magnifique essor.

Mais, en 1869, un tout petit ennemi fit son apparition, qui devait en moins de douze ans réduire à un cinquième le chiffre énorme que l’exportation du café avait atteint à cette époque. C’était le petit champignon qui s’attache à la feuille du caféier, et que la science a désigné depuis sous le nom de Hemileia vastatrix. Ce champignon apparaît sur les feuilles sous forme de petits points d’une brillante couleur orange, et les feuilles se fanent et tombent. La maladie surgit d’abord dans les nouveaux districts les plus reculés, et ne tarda pas à envahir toute la zone des caféiers. Pendant les premières années, elle sembla ne causer que peu de mal ; si les récoltes étaient moins abondantes, on l’attribuait aux influences des saisons, et l’on s’inquiétait assez peu du petit champignon, en dépit des fâcheux pronostics du docteur Thwaites, directeur des jardins botaniques de Ceylan. Ce qui contribua à endormir les planteurs dans une fausse sécurité, ce fut une hausse subite du prix du café en Europe et en Amérique : en quelques années, cette hausse s’éleva jusqu’à plus de 50 pour 100. Les planteurs trouvaient ainsi, dans le renchérissement de leurs produits, une compensation plus que suffisante à la diminution de leurs récoltes. Stimulés par cette hausse sans précédent, ils voulurent agrandir le champ de leurs opérations en étendant leurs cultures jusque dans ce massif montagneux qui se déploie du pic d’Adam à Nuwara Eliya, sur une étendue de 100 milles carrés, et qu’on avait regardé jusqu’alors comme trop élevé et trop humide pour la culture du café. Le gouverneur sir Hercules Robinson ouvrit cette vaste réserve on y perçant des routes à travers