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La plus importante de ces modifications, qui date de 1888, est particulièrement intéressante pour nous, non seulement à cause de sa portée même, mais aussi parce qu’elle est identique à la réforme qu’a voulu réaliser M. Joseph Fabre, au moyen de la proposition de loi soumise par lui au Sénat. On sait que le but de l’honorable sénateur était de rétablir pour la presse la juridiction de droit commun en ce qui concerne les délits d’injure et de diffamation commis contre des personnes investies d’une fonction ou d’un mandat publics, avec liberté de faire, par tous les moyens, la preuve des faits diffamatoires devant le tribunal correctionnel. L’impunité relative dont jouit actuellement la presse française, grâce à l’institution du jury, la presse italienne en a joui elle-même jusqu’en 1888. C’est alors, par la loi du 22 novembre, qu’ont été abrogés les articles 17, 27, 28 et 29 de l’Editto Albertino, relatifs aux outrages aux bonnes mœurs, aux injures, diffamations et offenses à l’adresse des agens de l’autorité à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions. Ces articles étaient remplacés par les dispositions du nouveau code pénal, mis en vigueur à la même époque. Les délits en question relevaient donc désormais du tribunal correctionnel, l’article 394 du code pénal stipulant, d’ailleurs, que la preuve de la vérité est admise, « si la personne offensée est un fonctionnaire public, et si le fait qui lui est attribué se rapporte à l’exercice de ses fonctions. »

Une autre réforme, procédant du même esprit, a été réalisée par la loi du 19 juillet 1894, qui enlevait à la compétence du jury, pour les déférer au tribunal correctionnel, les délits, commis par la voie de la presse, indiqués aux articles 246 et 247 du code pénal (excitation publique à commettre un crime, apologie publique d’un fait qualifié crime, excitation à violer la loi, excitation à la haine entre les classes sociales d’une manière dangereuse pour la tranquillité publique). Les peines prévues au code pénal pour ces délits ont été, en vertu de la loi du 19 juillet 1894, augmentées de moitié pour le cas où ils sont commis par la voie de la presse.

Examinons maintenant les réformes que le général Pelloux avait proposées, qui ont été d’abord modifiées par la commission, et qui, par suite d’un compromis de cette dernière avec le gouvernement, ont abouti à la rédaction figurant dans le décret-loi.

Il s’agissait, avant tout, de la question des responsabilités,