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péché. Picard critiqua spirituellement la gestion municipale. « La ville proclame que l’on voit chaque jour ses recettes augmenter, mais elle ne parle pas des moyens par lesquels on parvient à augmenter ces recettes. Voici comment on y arrive. Il y a encore à Paris des propriétaires qui ne sont pas au niveau des tarifs actuels et qui se contentent de louer leurs appartemens le double de ce qu’on les louait il y a dix ou quinze ans. Les contrôleurs de la ville se rendent chez eux. — Il faut de la vérité, disent-ils à ces propriétaires, vous devez certainement louer cette maison plus cher que vous ne dites. — En conséquence, on les impose non sur le prix auquel ils ont loué, mais sur le prix qu’on décide qu’ils auraient dû louer. C’est ainsi que le budget de la ville s’accroît chaque année et que les loyers augmentent dans la même proportion. Les habitans se demandent pourquoi, plus on bâtit, moins il y a de logemens. Mais la ville de Paris est très habile, quand elle a besoin d’emprunter ; elle a soin de produire (sa demande à la dernière heure ; quand il y a des détails et des explications à donner, elle en donne le moins possible. Le remède à tant d’abus, c’est l’élection. Nous attendons un projet de loi qui, dût-il être présenté à la fin de la session, rende à la ville de Paris un véritable Conseil municipal. »

Le rapporteur Devinck défendit la capacité et le zèle du Conseil municipal nommé en vertu d’une loi votée par le Corps législatif. Il examine les projets avec une complète indépendance et ne les admet que lorsqu’ils sont conformes à l’intérêt public. La gestion des finances de la ville de Paris est excellente. M. Picard se plaint de manquer de renseignemens ; il ne tenait qu’à lui de se les procurer. Tout le monde peut s’adresser au secrétariat de la ville pour avoir communication des délibérations prises : cinquante ou soixante exemplaires du budget de la ville ont été déposés à la bibliothèque de la Chambre ; M. Picard et ses amis n’avaient qu’à se donner la peine de l’étudier.

J’allai droit à cet argument tant soit peu impertinent : « Supposez que M. le Président du Conseil d’État entre dans cette enceinte au début de la session, en tenant à la main le gros volume bleu du budget général de l’État, et qu’il nous dise : Voici un budget qui a été très soigneusement discuté par un corps composé de personnes honorables et capables ; lisez-le ; tout y est parfaitement expliqué ; si ces explications ne vous suffisent pas, nous vous en donnerons d’autres ; mais, au bout de quelques jours,