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veuillez voter. Vous contenteriez-vous de ce langage ? Eh bien ! mes amis et moi, ne nous en contentons pas pour le budget de la ville de Paris. Nous voulons la possibilité d’exercer un contrôle, une vérification efficaces. Donner des éclaircissemens est toujours facile, comme il est toujours facile à un peintre habile de distribuer les objets sur sa toile en mettant les uns en relief et en enveloppant les autres d’une ombre qui les voile plus ou moins. Il n’est pas possible de trouver des personnes plus honorables que celles qui composent la commission municipale, mais il n’en est pas de moins aptes à exercer un contrôle sur les finances de la ville, par cela seul qu’elles ont été choisies par décret. C’est à celui qui paie à contrôler les dépenses. Dans le conseil municipal des plus petites communes, on appelle, dans certains cas, les plus imposés à prendre part à la délibération. C’est là un principe qui date de bien loin, car il remonte aux temps féodaux. » — Baroche passa à côté de la question et défendit le Conseil municipal, sans protester contre notre empiétement.

Ainsi, depuis mon discours dans la discussion générale du budget, tout le monde exerça à l’envi les droits inconstitutionnels d’initiative et d’interpellation. Parfois Morny murmura un avertissement non prohibitif, mais l’Assemblée parut trouver l’innovation de son goût, et ne s’impatienta pas un instant. Morny, dans une des dernières séances, dit : « Je ne parle ici qu’en mon nom personnel ; mes paroles n’engagent ni le gouvernement ni personne, mais je suis aussi d’avis qu’il y a quelque chose à faire (20 juillet). » — La cause était gagnée.

Les sessions suivantes, qui ont eu plus d’éclat extérieur, ont rejeté dans l’ombre celle de 1860 : cependant, de toute la seconde période du Corps législatif, elle fut, par l’abondance des sujets, par le talent des orateurs, et surtout par les résultats, la plus féconde : c’est d’elle que sortit la liberté législative.


V

Le public ne soupçonna pas le travail latent, mais efficace, qui s’opérait entre les murs clos du Corps législatif. Nous nous occupions beaucoup des journaux ; ils ne nous le rendaient pas et paraissaient nous ignorer.

Les grands directeurs de la démocratie, le Siècle et l’Opinion nationale, nous supportaient plus qu’ils ne nous aidaient. Ils