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je me disais qu’évidemment les moines coptes du VIe siècle de notre ère ne se seraient ni si sauvagement, ni si fanatiquement et si spécialement attaqués à toute une série de tombes, si ces tombes n’avaient pas été désignées à leur fanatisme par une raison quelconque. Ils avaient autour de leur couvent, bâti en pleine nécropole, assez d’autres tombeaux qu’ils pouvaient dévaster à leur choix ; pourquoi donc se porter à plus de deux kilomètres, jusqu’au pied de la montagne occidentale, pour se livrer à une tâche qu’ils auraient pu accomplir plus à leur aise tout près de leur demeure ? Il devait y avoir un motif déterminant leur conduite, et ce motif, c’est l’existence d’un culte nommé par eux idolâtrique et rendu par les habitans d’Abydos aux morts qui reposaient dans la nécropole d’Om-el-Ga’ab. S’il se fût agi d’un simple Pharaon, il ne serait pas très facile de se rendre compte de ce motif, ni même de comprendre le culte traditionnel ; si anciens que l’on suppose les Pharaons enterrés en ce lieu, on ne comprendrait pas comment le culte qu’on leur rendait n’a pas subi d’éclipsé, comment on le leur a rendu avec une si grande affluence, comment les offrandes se sont ainsi amoncelées autour de leurs tombeaux pour former ces collines encore assez élevées. Nous connaissons d’autres Pharaons à qui l’on a rendu hommage, dont le culte a continué à travers les siècles ; mais les hommages qu’on leur rendait étaient le fait de simples particuliers, leur culte était confié à des prêtres : ce n’était aucunement les hommages de toute une population durant tout un empire, et jamais les offrandes consacrées à leur souvenir n’avaient accumulé les masses énormes des témoignages d’Om-el-Ga’ab. Il faut donc se rabattre sur l’existence d’un culte local rendu à un homme considérable déjà pendant sa vie, élevé par le souvenir reconnaissant de la postérité à la dignité divine, tel que fut Osiris, le maître d’Abydos, comme l’appellent les textes égyptiens, l’Être Bon par excellence.

Le tombeau d’Osiris était donc au centre de la grande colline. C’était une véritable maison creusée dans le sol de la montagne, construite en briques, avec une enceinte de murs très épais, puisqu’ils atteignaient trois mètres d’épaisseur, ayant des appartemens rangés sur trois côtés, le quatrième restant libre, avec une grande cour centrale. C’est toujours la disposition, non seulement des maisons égyptiennes anciennes, mais encore le type des maisons dans un grand nombre de pays. Le hasard des fouilles me fit