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On ne peut assurément que déplorer de pareilles lenteurs : depuis les premiers mois de 1898, c’est-à-dire depuis le retour de la mission Roques, tous les élémens techniques de la solution désirable étaient réunis ; il fallait se hâter de diminuer et pour le Trésor et pour le commerce les charges des transports, en même temps que s’assurer le puissant instrument de pénétration et de pacification définitive qu’est une voie ferrée. Le retard n’est assurément pas imputable à l’administration locale, dont les pressantes instances sont venues se briser contre les hésitations de la métropole et l’indifférence irrémédiable que témoigne le Parlement dans les questions étrangères à l’intérêt électoral, L’occasion est passée et perdue d’obtenir des financiers français qu’ils exposent des capitaux dans un chemin de fer sous un abri moins sûr que celui de la garantie d’intérêt. Soit, mais que du moins Madagascar ne soit pas plus longtemps arrêté dans sa croissance, et que la construction directe lui fournisse le plus rapidement possible des facilités pour un nouvel essor économique[1].


VIII

Le général Gallieni a rendu compte, dans un remarquable rapport publié en mars 1899 au Journal Officiel, de la tache immense accomplie par lui à Madagascar. Ce n’est point le lieu de reprendre en détail l’exposé de son œuvre, l’intensité de son activité, la variété et l’ingéniosité de ses solutions[2]. Quelques-unes

  1. La loi qui vient d’être votée menace d’être assez lourde pour la colonie au point de vue financier. Le nouvel emprunt de Madagascar doit être, en effet, contracté sans garantie de l’État français. La commission parlementaire de la Chambre qui, sur le rapport de M. Argeliès, a conclu à l’adoption du projet, compte que l’emprunt pourra se négocier au taux d’intérêt de 3 et demi pour 100. Or, l’Indo-Chine n’a pu trouver de fonds qu’à 4,02 pour 100, et la Guinée à 4,10 pour 100, amortissement non compris, et cela avant le récent renchérissement de l’argent. Il est regrettable que, pour le seul et théorique plaisir de constituer une dette coloniale distincte de la dette métropolitaine, on impose à des colonies naissantes une charge supplémentaire de 1 pour 100 au minimum, qui, en définitive, retombe tout au moins indirectement sur les contribuables français, soit qu’il faille établir des taxes locales de consommation, soit qu’on se trouve empêché de réduire la subvention de la mère patrie au budget local.
  2. Il est à souhaiter que l’on publie quelque jour, pour l’instruction du pays, la collection de ses rapports de quinzaine au ministre. — Voyez aussi, dans la Revue des Deux Mondes du 15 janvier 1900, la magistrale étude du colonel Lyautey, le Rôle colonial de l’armée, et pour les opérations militaires de 1896 à 1897, la Pacification de Madagascar, par le capitaine Hellot, ouvrage rédigé d’après les archives de l’état-major du corps d’occupation.