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sence de compagnies rivales dans les bassins du Niger et du Congo. La France accepta l’invitation.

Jules Ferry, alors président du Conseil, dans une lettre au baron de Courcel, notre ambassadeur à Berlin, limitait le programme des délibérations aux trois points suivans : 1o établissement de la liberté commerciale dans le bassin et aux embouchures du Congo ; 2o application de la liberté de navigation aux fleuves du Niger et du Congo ; 3o définition des formalités à remplir pour que des occupations nouvelles sur la côte d’Afrique soient réputées valides.

Mais, comme une grande partie de cette région était traversée par des caravanes de marchands d’esclaves, il était impossible aux délégués des États civilisés de faire abstraction de la traite. M. le baron de Courcel, qui représentait la France, se joignit aux délégués de l’Angleterre et insista sur les mesures à prendre pour améliorer le sort des indigènes. C’est ainsi que la Conférence prit deux résolutions importantes. Par la première : 1o toutes les puissances, exerçant un droit de souveraineté dans ces territoires, s’engageaient à concourir à la suppression de l’esclavage, surtout de la traite. 2o Elles promettaient aussi de protéger, sans distinction de culte, ni de nationalité, toutes les institutions organisées à ces fins en tendant à instruire les indigènes. La liberté de conscience et la tolérance religieuse étaient expressément garanties à ces derniers, comme aux Européens (art. VI).

D’après un autre article (art. I), la traite des esclaves était interdite et les opérations qui, sur terre ou sur mer, fournissaient des esclaves à la traite devant l’être également, les puissances déclaraient que les territoires, formant le bassin du Congo, ne pouvaient servir ni de marché, ni de voie de transit pour la traite des esclaves de quelque race que ce soit. Chacune d’elles s’engageait à employer tous les moyens en son pouvoir pour mettre fin à ce commerce et punir ceux qui s’en occupent.

De son côté, Mgr  Lavigerie, devenu cardinal-archevêque de Carthage et primat d’Afrique, avec résidence à Tunis, avait conçu le plan grandiose d’une association européenne pour la suppression de la traite et de l’esclavage. Il exposa ses vues dans une première et solennelle conférence donnée à Saint-Sulpice (1er  juillet 1888). Après avoir décrit les misères de la traite des esclaves en Afrique, il adressait un appel pressant à ses auditeurs pour l’aider à les soulager et suppliait ces derniers, en particulier les