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de là certaines vues de politique générale qui leur étaient communes à tous deux. Ce n’est point en vain que, pendant plusieurs siècles, un pays a discipliné toutes ses énergies pour la lutte contre un même péril, la maison d’Autriche : par une curieuse continuité de l’histoire, les fidèles du vieux passé monarchique retrouvaient en 1856, dans ce passé même, une hostilité constante contre cette Autriche à laquelle le second Empire, au nom des principes du droit nouveau, déclarait à son tour la guerre. Et ce n’est point en vain que deux groupemens politiques ont longuement vécu côte à côte dans une même attitude d’opposition ; s’ils cessent, lorsque l’un d’eux est parvenu au pouvoir, de s’accorder sur le terrain des idées, ils demeurent toujours accessibles, l’un et l’autre, à la séduction des mêmes mots et des mêmes formules, mots conventionnels, formules magiques, dont les minorités amusent leur impatience et qui conservent pour elles, dès qu’elles sont appelées au gouvernement, l’attrait naturel des souvenirs de jeunesse. Or, au temps de la Restauration, les hommes de l’opposition démocratique, que le petit chapeau de l’Empereur planât encore ou non sur leurs rêves, professaient, par une commune entente, la haine contre la Sainte-Alliance et contre cette maison d’Autriche qui en était la cime ; le culte de la liberté des peuples ; et la conception qu’ils avaient de la France, garante et gardienne de cette liberté. Et sans doute, entre les fils de ces républicains et les fils de ces bonapartistes, le Deux Décembre creusa un fossé ; mais, de part et d’autre de ce fossé, l’on restait attaché au même idéal. Les ouvriers parisiens acclamant l’empereur au moment de son départ pour la guerre d’Italie étaient les hérauts de cet idéal : ce qu’ils acclamaient, c’était peut-être, en quelque mesure, l’éclat du panache, de ce panache impérial qu’ils avaient eux-mêmes, de leurs propres mains, attaché au képi de l’ancien président de la République ; mais c’était surtout la personnalité du souverain, incarnant par sa politique extérieure les vieilles idées libérales, démocratiques, nous dirions volontiers républicaines : l’idée de l’émancipation des peuples ; de la fraternité entre ces peuples émancipés ; de la pacification universelle succédant à cette fraternité.

Deux brochures de l’époque, républicaines d’origine, méritent à cet égard d’être relues. L’une, intitulée : Du principe de nationalité : l’Italie, est signée de Charles Fauvety, un notable du saint-simonisme et de la maçonnerie ; l’autre est d’Anatole de la