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RETOUR D’HIVER


Pénétrons-en la grâce exquise, qu’exagère
Le trouble indéfini de la chute du jour,
Et, dans cette minute unique et passagère,
Savourons tout le charme éternel de l’amour.

Voici les tristes vents annonceurs de Décembre,
Ils chassent devant eux l’automne qui s’enfuit.
On dirait que le soir ne quitte plus la chambre.
Et l’on sent tout le jour l’approche de la nuit.

Seules, dans les logis bien clos où l’ombre rôde.
Les femmes, que la nuit effare, ont mieux compris
Qu’il fait bon être deux dans la chambre bien chaude,
Et guettent en tremblant le retour des maris.

Dès qu’ils auront quitté l’usine ou la charrue,
Vers la demeure aimée ils hâteront le pas.
Ils ne flâneront pas à causer dans la rue ;
Le cabaret, ce soir, ne les retiendra pas.

Ils songent que là-bas s’inquiètent les femmes.
Car la fin de l’automne et le jour qui finit,
Par ces retours d’hiver, éveillent dans les âmes
Un instinctif besoin de se blottir au nid.


André Dumas .