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Culturkampf, soulever contre le cardinal Svampa une partie de la populace de Bologne, complimenter tel maire de village qui donne l’ordre, dans les écoles, de substituer au Pater Noster la prière visée par le Saint-Office, réclamer que l’église romaine de l’Ara Cœli, propriété municipale, ouvre ses portes, de force ou de gré, pour la récitation publique de cette prière, et accumuler les invectives et les outrages à l’encontre du cardinal secrétaire d’État.

Si bien que les calculs, d’ailleurs assez grossiers, par lesquels ces journaux prétendaient transformer en un acte de résipiscence et de « conciliation » la part prise par le Vatican au deuil général du monde civilisé, n’ont abouti, après quinze jours de gaucheries, qu’à rendre, entre les deux pouvoirs, le fossé plus large et les rapports plus pénibles. En réparant par un rapide silence les effets de leur débordante et compromettante prolixité, ces journaux répondraient, tout ensemble, au digne et discret désir d’une reine en deuil et aux intérêts politiques du royaume.


On a mieux à faire, en effet, qu’une guerre religieuse : déjà, depuis l’avènement de Victor-Emmanuel III, foisonnent les projets d’une politique nouvelle ; et tous ne sont pas dénués d’intérêt. Nous laisserons de côté, tout de suite, un vœu qu’on a fréquemment émis en ces derniers jours, et qui recèle, à l’endroit du règne précédent, un reproche dont tout l’étranger s’étonnera. Vingt-deux ans durant, une femme d’élite s’est donné pour tâche d’extraire de la lave encore chaotique du Risorgimento les élémens délicats et subtils d’un Rinascimento artistique et littéraire, et de renouer les plus belles traditions italiennes en restaurant le culte de la beauté dans le cœur d’une nation qui, depuis quelques lustres, se laissait exclusivement fasciner par l’idole de la liberté. Et c’est à l’heure où Marguerite de Savoie est momentanément détournée de cet apostolat esthétique par le plus atroce des deuils, que nous voyons des journaux de secte, toujours désireux d’opposer cour à cour et Quirinal à Vatican, se plaindre que la cour royale, sous le dernier règne, n’ait tenu qu’une médiocre place dans la vie de la « capitale ! » Passons et n’insistons pas.

S’il en faut croire d’autres publicistes, le gouvernement d’Humbert Ier aurait fait, pour la défense du territoire national, des sacrifices insuffisans : la marine, l’armée, appelleraient de